ZOOM DOSSIER Pour les touristes étrangers, la moto peut être un moyen tout à fait original de découvrir l’archipel. Une agence française Air Moto Tours (01 30 85 09 68, http://airmototours.com) s’est spécialisée dans ce type de voyage. Vous pouvez la retrouver au Salon de la moto, bâtiment 6, alléeC, stand 67. largement les bôsôzoku de mon époque, c'était beaucoup plus sain. Dans votre chronique, vous écrivez souvent sur des phénomènes de société, quel est le message que vous voulez adresser aux lecteurs de Hotbike ? I. S. : Juste une réflexion. Il y a vingt ans, avec notre argent de poche, on achetait de l'essence pour nos motos ou des pièces de rechange, des disques ou des guitares. Mais je vois que maintenant les jeunes dépensent tout leur argent dans leur abonnement de téléphone portable, ça me déprime beaucoup. Il semble que le portable soit devenu l'instrument unique de communication et de loisir. Je ne sais pas en France, mais ici, non seulement on se voit de moins en moins en direct, mais on ne s'appelle presque plus, tout passe par message et par chat ! On vit dans un monde de l'instantané, avec des informations sur le monde en un clic, toutes les actualités en quelques lignes sur son portable mais ça ne nous amène pas à la connaissance du monde réel. La moto peut être un élément libérateur pour les jeunes qui se détachent de la réalité ? 10 ZOOM JAPON numéro 56 décembre 2015 I. S. : Oui, car la moto incarne le monde réel, contrairement au monde fantaisiste des mangas et des jeux vidéos. Enfourcher sa moto, c'est sentir la morsure du soleil, du vent, du froid, c'est physique. Un jour, un jeune biker américain m'a dit que la moto était dans son sang. Il avait tatoué sur son épaule « Pain is my friend », la douleur est mon amie. C'est souvent la difficulté qui donne la joie de vivre. Vous avez édité dans un numéro récent votre tour du Japon à moto. Pensez-vous que ce soit un bon moyen de découvrir le Japon pour les touristes français ? I. S. : En tout cas, c'est un moyen original qui permet de voir autre chose. On n’économise pas vraiment sur le prix d’un billet de train à grande vitesse, car les péages d'autoroute sont chers, mais on peut conduire tranquillement sur les nationales. De Tôkyô à Kyôto, c'est tout droit en longeant la mer ! Pour les petits budgets, dormir dans un sac de couchage à la belle étoile ne présente aucun danger au Japon. Sinon, il y a les innombrables business hotel ou « love hotel » avec un très bon rapport qualité-prix et l'occasion de découvrir les motels à la japonaise ! Je peux informer, sur ma page Facebook les motards français qui voudraient essayer. Vous avez créé un deuxième magazine en 2000 intitulé Tabigaku, mot à mot « apprendre en voyageant » ? I. S. : Tabigaku est écrit par des voyageurs de tout bord. Il n'y a pas uniquement le back-pack, mais beaucoup d'autres manières de voyager. Personnellement, je n'ai jamais été fan de back-packing, car on n’a pas besoin d'économiser systématiquement chaque centime. On peut voyager à moto, à chameau, à dos d'âne ! Quand j'ai découvert l'Inde, j'ai reçu une décharge électrique. Je me sentais cent fois plus à l'aise qu'au Japon ! Je n'avais pas besoin de faire des salamalecs pour demander une cigarette, les gens avaient l'esprit ouvert. Ça a remis en place tout mon système de valeurs. Et ça m'a libéré de ma timidité. Je pouvais enfin aller partout sans avoir peur. Finalement, après toutes ces années sur les routes, j’ai fini par me dire que j'étais enfin devenu un biker ! Propos recueillis par ALISSA DESCOTES-TOYOSAKI Jérémie Souteyrat pour Zoom Japon |