Trois Couleurs n°170 jun/jui 2019
Trois Couleurs n°170 jun/jui 2019
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°170 de jun/jui 2019

  • Périodicité : mensuel

  • Editeur : MK2 Agency

  • Format : (170 x 285) mm

  • Nombre de pages : 108

  • Taille du fichier PDF : 10,0 Mo

  • Dans ce numéro : la femme de mon frère.

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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ZOOM ZOOM LES FILMS DU MOIS À LA LOUPE YVES Après avoir investi les sous-sols de l’Élysée et le monde des communicants dans le savoureux Gaz de France (2015), le Français Benoît Forgeard donne vie à un frigo ultra intelligent exauçant les vœux d’un jeune rappeur à travers cette comédie déjantée, présentée cette année à la Quinzaine des réalisateurs. Toujours absurde mais prenant un virage plus réflexif sur l’intelligence artificielle et la société digitalisée, Yves est aussi jouissif que perturbant. Jérem (surprenant William Lebghil, lire p.48) enregistre son morceau de rap « Carrément rien à branler » dans le sous-sol de la maison vide de sa grand-mère. Un jour, So (truculente Doria Tillier), statisticienne pour la start-up Digital Cool, le contacte pour lui proposer d’essayer Yves, un nouveau frigo intelligent capable d’interagir avec le client pour lui offrir tout ce qu’il désire. Jérem n’est pas déçu du résultat  : grâce à ses algorithmes, Yves fait de lui une star de YouTube… Avec cette rafraîchissante comédie portée par un héros cartoonesque, Benoît Forgeard s’amuse de notre culture digitalisée. Dans une mise en scène volontairement froide, le cinéaste insuffle sa fantaisie à travers d’hilarants textes de rap virilistes et une géniale parodie de l’esprit start-up incarné par le patron de Digital Cool, un gourou monomaniaque, symbole d’une société qui se prétend à l’écoute de ses salariés mais qui pousse sournoisement à la concurrence. Mais la vraie réussite du film, c’est qu’il déjoue nos attentes. On croit d’abord assister à une variation contemporaine du pacte de Faust  : en acceptant le deal,
Jérem a vendu son âme à la diabolique intelligence artificielle, allant jusqu’à utiliser l’Auto-Tune, l’instrument, selon lui, des traîtres du vrai rap. Quand, frustré d’un succès trop facilement obtenu, il se sépare d’Yves, Forgeard esquisse l’idée d’une toute-puissance de la machine – partout où il va, Yves séduit (So, des juges, le jury de l’Eurovision). On sent alors poindre la dystopie robotique, l’amenuisement de l’humain face à l’intelligence artificielle. Or, Forgeard complexifie les choses, souligne l’automatisme des hommes emplis de tics, d’habitudes, tout en humanisant la machine. Au point que l’on se figure le corps d’Yves, que l’on imagine ses émotions (on pense à une scène de plan à trois avec Yves, étrangement sensuelle). Comme son héros faussement je-m’en-foutiste, Forgeard déguise sous un minimalisme apparent une impressionnante audace créative. JOSÉPHINE LEROY —  : de Benoît Forgeard, Le Pacte (1 h 47), sortie le 26 juin — FILMS 63 3 QUESTIONS À BENOÎT FORGEARD Jérem est fou de rap. Pourquoi avoir choisi ce milieu ? Ça m’a permis de mettre l’accent sur le verbe et d’apporter de la grossièreté dans le film. Je voulais qu’il y ait un côté très vivant, pour contrebalancer la rigidité du frigo. Et puis, chez les rappeurs, il y a un rapport particulier à la virilité. Confronter Jérem, un mec en apparence assez immature qui reprend dans son rap des codes masculinistes, à une machine qui le concurrence sur le terrain de la séduction, ça avait pour moi un bon potentiel comique. Est-ce qu’il y a des films sur l’intelligence artificielle qui vous ont inspiré ? J’avais des références en tête  : Her de Spike Jonze, L’Homme bicentenaire de Chris Columbus… Mais avec Yves, j’ai humblement essayé de faire quelque chose de nouveau. Souvent, dans les fictions, on dénonce les déviances de l’intelligence artificielle. Personnellement, je ne considère pas du tout les machines comme nos ennemies. J’imagine juste que, si demain on cohabite, ça ne sera pas forcément simple. La technologie a cette tendance à mettre le nez dans nos affaires pour nous aider à être meilleurs. Ça devient très difficile pour les humains de résister aux prescriptions des machines. Vous parvenez à donner corps à un frigo, et même à le sexualiser. Quelles astuces ou techniques de mise en scène avez-vous utilisées ? Le frigo, c’est un objet qui est en soi assez anthropomorphe  : il a une taille humaine, et deux portières qui sont comme des bras. On a bien sûr pensé au côté visuel. On a pas mal bossé avec l’équipe sur la pyrotechnie et la lumière pour dégager autour d’Yves une fumée envoûtante. Mais c’est surtout sur l’aspect sonore qu’on a travaillé. Antoine Gouy, le comédien qui prêtait sa voix à Yves, était toujours à côté de la pièce où l’on tournait. Ce qui fait que chaque prise était différente, qu’Yves interagissait avec Jérem, ce qu’on n’aurait pas pu obtenir avec des enregistrements. C’est ce qui lui donne, à mon sens, une présence. PHILIPPE LEBRUMAN



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