ZOOM ZOOM PEARL Maquillages FILMS SORRY TO BOTHER YOU 68 — : d’Elsa Amiel Haut et Court (1 h 22) Sortie le 30 janvier — savants, bikinis pailletés et gros muscles : pour son premier long métrage, la Française Elsa Amiel pousse la porte d’un monde fabuleux, celui du bodybuilding féminin. Dans un immense hôtel isolé en périphérie urbaine se tient une grande compétition type Mister ou Miss Univers. Léa Pearl, synthèse exceptionnelle entre les traits féminins de Vénus et les muscles virils d’Apollon, a toutes les chances de décrocher le titre cette année ; mais c’est sans compter sur son ex, qui débarque sans crier gare pour lui confier de force la garde de leur jeune fils. La beauté de ce quasi-huis clos tient autant à son interprète principale, l’intense culturiste suisse Julia Föry, qu’à la façon dont la cinéaste filme ces corps hors norme (au plus près de leur chair et de leur sueur, abolissant la distance qui nous ferait les regarder comme des phénomènes de foire) et l’hôtel labyrinthique qui abrite le concours (comme un lieu fantomatique dans lequel on croise des silhouettes de colosses qui traînent leur spleen), éclatant élégamment au passage un grand nombre de préjugés sur les genres. TIMÉ ZOPPÉ Jusqu’où — : de Boots Riley Universal Pictures (1 h 51) Sortie le 30 janvier — sommes-nous prêts à aller pour nous élever sur l’échelle sociale ? Le rappeur Boots Riley pose la question dans sa première réalisation, une comédie ultra rythmée et profondément anticapitaliste. Quand un télémarketeur noir découvre qu’en utilisant une « voix de Blanc » – doublée par le comédien David Cross – il peut décupler ses ventes, il devient la coqueluche de ses boss (dont le plus fou est joué par un Armie Hammer exalté), accède aux étages supérieurs de son entreprise, là où l’argent coule à flots, et se coupe de ses proches (Tessa Thompson, Steven Yeun). Dans la lignée de Get Out – l’excellent Lakeith Stanfield, vu dans le film de Jordan Peele, tient ici le rôle principal –, Sorry to Bother You prend aussi la question du racisme pour toile de fond. Boots Riley, à coup de bricolages formels à la Gondry et de vannes bien senties sur les cultures blanches et afro-américaines, ne raille pas seulement la cupidité des puissants, mais dézingue aussi l’instinct de Rastignac qui sévit en chacun de nous – qui sommes prêts à nous arranger avec nos principes pour quelques billets de plus. PERRINE QUENNESSON |