ZOOM ZOOM Adapté d’un roman de Laurent Mauvignier, le dernier film du Belge Joachim Lafosse (L’Économie du couple, 2016) raconte les retrouvailles entre un fils et sa mère sous la forme d’un voyage initiatique à la fois âpre et doux. Dès l’ouverture du film, on embarque dans un périple nébuleux : sans préambule ni contextualisation, on se retrouve au beau milieu des terres sauvages du Kirghizistan, pays montagneux d’Asie centrale. C’est le chemin de traverse choisi par la douce Sibylle (émouvante Virginie Efira), une mère qui, séparée depuis longtemps du père de son enfant, utilise ces vacances tout sauf relaxantes pour renouer des liens avec son fils, Samuel (intense Kacey Mottet-Klein), un adolescent colérique qu’elle n’a que très peu vu depuis qu’elle a refait sa vie. Juchés sur leurs chevaux, mère et fils avancent, Qu’est-ce qui vous a plu dans le roman de Laurent Mauvignier ? Il m’a fait beaucoup réfléchir au fait que les fils ont du mal à considérer que leurs mères sont avant tout des femmes, avec une histoire, des désirs… Mais je sens qu’aujourd’hui il y a une prise de conscience. À mon avis, c’est le grand progrès de notre époque. FILMS CONTINUER 80 entrent en conflit et développent aussi une complicité qui transparaît rarement, mais limpidement, à l’écran. Joachim Lafosse les accompagne avec tact, ménageant aussi bien les instants de solitude – un très beau plan filmé en contre-plongée montre Samuel en haut d’un roc, dansant sur une musique techno écoutée sur son iPod – que des moments de tension secs, abrasifs, qui contiennent toute la rancœur et les regrets des protagonistes. À travers une économie de dialogues maîtrisée, les mots, toujours pesés et jamais innocents, rendent plus saillante la complexité de cette relation qui, sous nos yeux, renaît. JOSÉPHINE LEROY — : de Joachim Lafosse Le Pacte (1 h 24) Sortie le 23 janvier — 3 QUESTIONS À JOACHIM LAFOSSE Comme dans L’Économie du couple, vous vous intéressez au conflit, à la tension. Je m’intéresse à la difficulté qu’on a à partager ses désirs intimes et, à cet instant où ceux de chacun parviennent à se rencontrer, à ce qui révèle quelque chose de nouveau. Lorsque Sibylle dévoile à Samuel ce qu’elle a ressenti par le passé, il commence à comprendre sa colère. Que révèle le rapport privilégié qu’entretient Samuel avec ses chevaux ? Au-delà du fait qu’il s’en sert comme excuse pour échapper à la confrontation, son amour pour ces animaux, sa façon de les soigner, le renvoie surtout à son propre besoin d’être soigné. Il se retrouve aussi dans leur caractère incontrôlable, ce qui l’oblige à être dans le réel. |