ZOOM ZOOM 8, AVENUE LÉNINE Les TERRA FRANCA FILMS 74 — : de Valérie Mitteaux et Anna Pitoun Point du Jour/DHR/À Vif Cinémas (1 h 40) Sortie le 14 novembre — documentaristes Valérie Mitteaux (Fille ou garçon. Mon sexe n’est pas mon genre) et Anna Pitoun donnent corps et voix à une communauté rom malmenée par les médias et par certains discours politiques. De 2002 à 2017, elles ont suivi le parcours de Salcuta Filan, une femme combative et joyeuse malgré les embûches (discriminations, expulsions, séparations d’avec ses enfants…), de son installation dans un camp de caravanes à Achères, dans les Yvelines, jusqu’à l’obtention de son premier appartement, dont l’adresse donne son titre au film. En immersion dans son intimité, on accompagne Salcuta au quotidien, dans des réunions associatives, alors qu’elle exerce de nombreux emplois ou qu’elle observe l’émancipation de ses deux enfants qui grandissent, se marient et sont parents à leur tour. Par ce choix rare de filmer leur héroïne durant quinze ans, les cinéastes s’attachent à montrer un processus d’intégration réussi, à mesure qu’il se déroule, tout en déconstruisant patiemment les clichés racistes. Elles documentent aussi avec tendresse la mue progressive d’une femme et d’une mère acharnée, en quête d’indépendance. HILÀRIO MATIAS DA COSTA Au — : de Leonor Teles Docks 66 (1 h 22) Sortie le 21 novembre — fil des saisons, le quotidien d’une famille portugaise au bord du Tage, dans la ville de Vila Franca de Xira. On pense d’abord avoir affaire au portrait du père, Albertino, vieux pêcheur bourru à l’œil alerte qui vient de se voir confisquer sa licence. Mais, peu à peu, les autres membres de sa famille prennent leur place au premier plan du documentaire : sa femme, Dalia, qui gère un snack, en plus du logis, et leurs filles, dont l’aînée va se marier. L’attente et les préparatifs nuptiaux cristallisent l’attention, faisant lentement dériver le récit et la parole vers d’autres contrées thématiques, comme l’évolution des mœurs et des traditions, sur fond de choc de générations. Quelques bouffées de bonheur seront arrachées çà et là au flux immuable du temps. Un flux capté avec indolence et subtilité par Leonor Teles dans un format d’image quasi carré et un bain de musique soul. La cinéaste portugaise, qui a elle-même grandi à Vila Franca de Xira, insuffle à cette mosaïque de mouvements répétitifs (sur fleuve, sol et ciel) son pouls particulier, impressionniste, entre hypnose inquiète et chaleur mélancolique. ÉRIC VERNAY |