ZOOM ZOOM CÉLÉBRATION Ce FILMS 72 — : d’Olivier Meyrou Norte (1 h 14) Sortie le 14 novembre — fascinant documentaire, dont la sortie a été bloquée par Pierre Bergé de son vivant (il est décédé en 2017), revient sur le mythe Yves Saint Laurent et les rouages de sa légendaire maison. De 1998 à 2001, Olivier Meyrou (Au-delà de la haine) s’est immiscé dans les bureaux de l’avenue Marceau et lors de galas, défilés et interviews du créateur, et a saisi les images des dernières années d’un artiste devenu presque fantomatique, lunaire en entretien et effacé lors des célébrations autour de son génie. Celui qui se proclame, dans le film, le « dernier gardien d’une certaine élégance » est ainsi capturé en un instantané pre-mortem qui achève de l’instituer comme légende. En documentant aussi la tentative de Pierre Bergé de pérenniser l’héritage de son compagnon, brossant un portrait à la fois tendre et critique du couple (on découvre un Bergé parfois vaniteux et narcissique, ce qui motivait sans doute sa volonté d’empêcher la diffusion du film) et en mettant en lumière les travailleurs de l’ombre (associés, couturières), le cinéaste rend brillamment compte d’un empire qui a fini par dépasser son créateur. HILÀRIO MATIAS DA COSTA SAMI. UNE JEUNESSE EN LAPONIE Dans — : d’Amanda Kernell Bodega Films (1 h 53) Sortie le 14 novembre — son premier film, Amanda Kernell traite de l’oppression des Sámis, un peuple autochtone du nord de la Suède, pour mettre en lumière une part d’ombre de l’histoire de son pays. Christina, installée à Uppsala, accepte d’accompagner son fils à l’enterrement de sa sœur cadette. Ce retour sur le territoire sámi de ses origines plonge la vieille femme mutique dans ses souvenirs, et lance le film dans un long flash-back retraçant son parcours : l’enfance dans les années 1930 ; l’adolescence dans un internat suédois, à l’époque où le gouvernement enclenche un processus d’acculturation des Sámis ; la violence de la ségrégation et des premières évaluations ethniques (mesures corporelles, étude de la culture sámi sous un angle folklorique), véritable colonialisme intérieur qui la pousse ensuite à fuir vers la ville pour y devenir une « vraie » Suédoise… Passionnant pour son exploration très documentée d’une autre histoire de la Suède, le film tire sa force de son héroïne libre et paradoxale, pour qui le rejet radical des origines se mêle à un désir d’émancipation commun à tous les adolescents. HILÀRIO MATIAS DA COSTA |