ZOOM ZOOM I Comment affronter le départ inattendu d’un proche qui a fait le choix du djihadisme ? C’est la question abordée avec finesse par le Tunisien MohamedBen Attia, qui tourne le dos au film-dossier pour signer le portrait sobre et poignant d’un père désemparé. Attentionné voire un brin envahissant, Riadh, la soixantaine, s’inquiète pour son fils, Sami, en proie à des migraines alors que le bac approche. Un jour, le jeune homme disparaît, parti en Syrie sans donner d’explication. Sous le choc, Riadh se lance dans une entreprise déraisonnable : faire le voyage à son tour pour ramener son fils. Après avoir consacré son premier long métrage, le remarqué Hedi. Un vent de liberté (2016), à la jeunesse tunisienne, MohamedBen Attia s’intéresse ici à un homme d’une autre génération. Plutôt que riM FILMS MON CHER ENFANT À travers le personnage de Riadh, vous vous intéressez à une génération dont on parle peu… Ce qui m’a intéressé, c’était de parler d’un homme qui a vécu sa vie. Il l’a pensée très simplement, en choisissant d’être d’abord un homme au travail, ensuite un mari, puis un père de famille. Dès lors qu’il perd son travail puis son fils, sa perception du bonheur change. 60 de spéculer sur les raisons du départ de Sami, le cinéaste a eu la judicieuse idée de s’attarder sur la figure d’un père déjà rendu vulnérable par la perspective de son départ à la retraite. MohamedDhrif excelle à incarner ce vieil homme vaillant à la démarche gauche. Maladroit dans l’expression de ses sentiments, Riadh est pourtant capable de mentir à sa femme, meurtrie, pour la protéger. Jamais pesant, Mon cher enfant a la générosité d’offrir à son héros des moments d’insouciance, en compagnie de collègues de travail ou d’amis d’un soir dans un bar. Comme si l’espoir passait forcément par le collectif. JULIEN DOKHAN — : de MohamedBen Attia Bac Films (1 h 44) Sortie le 14 novembre — 3 QUESTIONS À MOHAMED BEN ATTIA Était-il évident dès le départ que les motivations de Sami resteraient floues ? C’est difficile de croire détenir la vérité sur ce sujet. On a longtemps cru qu’il y avait un même endoctrinement pour tous ; hélas, les choses se passent d’une façon plus perverse. Et puis, dans le cas de Sami, on peut parler d’un mal-être existentiel plus que de raisons tangibles. Le personnage de la collègue témoigne de la diversité de la société tunisienne… Quand je travaillais chez Renault, j’ai connu une collègue qui était comme la Sameh du film. Elle se bat pour sa famille, elle a un franc-parler et une ouverture d’esprit. Ce qui m’a intéressé, c’était ses paradoxes. Elle peut sembler très moderne et avoir peur du qu’en-dira-t-on. |