BOBINES Vincent Lacoste et Isaure Multrier c’étaient les séquences d’émotion : ça lui faisait peur d’être confrontée à ça. Après, j’ai beaucoup parlé avec elle, j’ai essayé de ne pas la prendre en défaut, d’être le plus honnête possible, et puis de la mettre dans une atmosphère bienveillante. À un moment, la fillette refuse de jeter les affaires de toilette de sa mère disparue. Que révèle cette scène ? Il me semble que les enfants sont très attachés à ce genre de choses. C’est comme s’ils ressuscitaient l’être aimé grâce aux objets. C’est un peu comme cette scène dans laquelle Amanda monte les escaliers, ouvre la porte, et on devine tout de suite qu’elle s’imagine retrouver sa mère de l’autre côté. C’est une pensée magique, elle sait très bien que c’est impossible. Comment avez-vous imaginé l’attentat qui surgit dans le film, et sa représentation ? Pour moi, c’était inconcevable d’écrire une histoire à partir d’un attentat réel. La question se cristallisait beaucoup autour du lieu de l’attentat. Il fallait qu’il renferme une espèce d’abstraction, même s’il est aussi très concret puisque c’est le bois de Vincennes. C’est malheureusement très plausible comme EN COUVERTURE 28 décor. Et, en même temps, la forêt nous ramène au domaine du conte. Ça m’aurait mis mal à l’aise de situer cette irruption de la terreur dans une zone très identifiée, plus circonscrite, dans un grand magasin type BHV. Après, même si le sujet des attentats est périphérique dans le film, je ne voulais pas être dans le contournement de la violence. Ça aurait été de la fausse pudeur de l’éluder. Lorsqu’il arrive sur les lieux de l’attentat, David est comme sonné, tandis que le récit devient sourd, presque irréel. Oui, juste avant, il est place Daumesnil. Il arrive porte Dorée, c’est bondé de voitures. Il quitte la ville et, petit à petit, il gagne la forêt. La lumière est en train de tomber et sur les lieux du massacre il y a une forme d’abstraction qui se répand. Comme si les images réelles de l’événement n’étaient pas encore arrivées à son cerveau, qu’il avait une sorte de protection qui l’empêchait d’accéder à l’horreur, comme un petit contretemps qui permette de survivre. Que reste-t-il dans le film de vos impressions de la nuit du 13 novembre 2015 et de ce qui a suivi ? La stupéfaction, le silence, le vide de la ville. Évidemment, ça ne nous empêche pas |