d’Ilulissat, dans l’ouest du pays, est son principal adversaire. Le match du jour est donc empreint d’une certaine tension historique. Si B-67 venait à perdre, ce serait la première fois depuis 2009 qu’ils n’atteindraient pas la finale. Mais pour ce club, qui jouera à plus de 320 km de chez lui, avec un effectif composé en majorité de joueurs de l’équipe des moins de 19 ans, le match ne sera clairement pas du gâteau. Un sondage local sur Facebook évalue leurs chances de victoire à tout juste 30%. S’ils s’inclinent, outre la petite finale, leur saison de foot d’une semaine se terminera ici et ne reprendra que dans 365 jours. Quand on vit sur le territoire le moins densément peuplé du monde – recouvert de glace sur 80% de sa surface et où la neige tombe sept mois et demi par an –, les opportunités de jouer au football sont rares. Pour B-67, les montagnes aux sommets enneigés, les baleines en chasse dans la mer à quelques encablures de là, les chiens de traîneaux qui hurlent, tout cela n’existe pas. Rien d’autre n’existe en dehors du terrain, du ballon et des 90 prochaines minutes. Quatre jours plus tôt, Jimmy Holm Jensen, l’entraîneur de B-67, convie The Red Bulletin à une visite officielle du QG de fortune de l’équipe à Sisimiut : un club social pour personnes âgées réquisitionné pour l’occasion. « Ça sent le vieux », blague-t-il. Mais ce sera pourtant bien dans ces modestes locaux que séjourneront pour la semaine à venir vingt jeunes joueurs, accompagnés de Jensen et de David Janussen, l’entraîneur adjoint. Des corps endormis jonchent encore les matelas dans le dortoir improvisé, tandis que les lève-tôt font une partie d’Olsen, un jeu de cartes nordique plus connu chez nous sous le nom du Huit américain. Il y a du rap en musique de fond. Le couloir est envahi de baskets et de chaussures de foot, la cour est parcourue de fils d’où pendent des maillots en train de sécher et la cuisine a été transformée en une usine de préparation de pâtes à échelle industrielle. Ailleurs dans la ville – la deuxième plus grande du Groenland avec ses 5 524 habitants –, d’autres équipes ont élu domicile tant bien que mal dans des salles de sport dont l’aspect, si ce n’est l’ambiance, évoque plus des centres de secours aux sinistrés, avec leurs matelas et autres lits de fortune entassés contre les murs. « On s’éclate, on essaie de toujours être à fond », explique Patrick Frederiksen, 25 ans, capitaine de l’équipe. Il navigue entre les joueurs de cartes et ceux qui commencent à ouvrir l’œil afin de faire le point avec chacun d’entre eux. « Il y a toujours de la musique. Les gens s’amusent beaucoup, ils chantent et ils dansent. » Supporteur d’Arsenal, Frederiksen a été promu capitaine de B-67 en 2018 et ce tournoi est sa première opportunité de faire ses preuves. « C’est vraiment important, c’est comme la Coupe du monde. Ça nous donne la chance de montrer au Groenland que notre équipe est la meilleure et que nous travaillons dur pour Quand le numéro 3 de B-67 se blesse, son remplaçant utilise du scotch pour transformer le numéro en 31 afin de pouvoir jouer. 48 THE RED BULLETIN |