Société a 1 Parler de ce qu’on ne connaît pas « Restaurant très surfait, tout en apparat, très peu de chose dans l’assiette, l’assiette la mieux garnie est celle de l’addition. » Ce commentaire, posté en 2013 sur TripAdvisor a coûté 7500 euros à son auteur. Le verdict, tombé il y a un mois, est une première en France. Ce qui a motivé la condamnation du tribunal ? Pas la répétition inutile du mot « assiette », mais le fait que le restaurant en question, Loiseau des Ducs à Dijon, n’a ouvert que cinq jours après cette critique négative. Du coup, notent les juges, elle « ne peut pas correspondre à l’expression d’un avis objectif se fondant sur une expérience réelle ». Bien vu. Ça ne vous rappelle personne ? Vous, le visage transfiguré par la mauvaise foi (c’est-à-dire rayonnante), en train de détruire le dernier roman de Christine Angot ou de Marc Levy (selon que vous habitez à Paris ou en province) que vous n’avez évidemment jamais lu. Pas besoin de rouler vos yeux sur « les métaphores paresseuses » de « cet auteur surévalué » pour savoir que vous avez mieux à faire et que « la vraie littérature » vous « attend ailleurs » (visiblement dans The Walking Dead). 2 7 0 Être trop tatillon À propos d’un pressing du 9 e arrondissement de Paris, Nicolas D., Yelpeur aux 292 avis (et probable faussaire), note : « Rien d’exceptionnel, juste l’efficacité et le sourire de cette famille de travailleurs. » Famille qui, va savoir pourquoi, devra, malgré son sourire, se contenter de trois eSTYL7cST Ariana Grande Pour protester contre la malbouffe, la chanteuse qui se prend pour un chaton sur son Instagram a léché un beignet au Wolfee Donuts (en hurlant qu’elle détestait l’Amérique) avant de le reposer. Capté par les caméras de vidéosurveillance (et leaké par TMZ), le donutgate a déchaîné les critiques mais fait tripler les ventes du magasin. D’oh ! étoiles sur cinq. Comme cet hôtel de Lille dont SophieC, « auteur de niveau 2 » chez TripAdvisor déplore l’absence de patère dans la salle d’eau. Qu’importe si par ailleurs du champagne millésimé coule des robinets et si les femmes de chambre vous parfument au Chanel N°5 à chaque passage, la patère n’était pas là. Ça ne vous rappelle personne ? Vous, qui après trois semaines de relation avec J., êtes passée de « ce mec est un volcan, quand il me touche c’est la faille sismique » à « je suis pas sûre de pouvoir faire ma vie avec un mec qui dit chocolatine ». Et vous encore qui, faute d’avoir trouvé un sac « qui vous procure une émotion », vous baladez avec un tote bag élimé aux couleurs d’une marque de tampon depuis six mois. a 3 Donner son avis sur tout En moyenne, seuls 1,5% des clients laissent une critique sur les sites d’avis*. Parce que finalement, who cares de votre avis sur le nouveau burger de la rue Marion Cotillard (spoiler : personne). Mais certaines occasions, comme l’ouverture de la Brasserie Barbès à Paris, temple bobo en pleine no go zone d’après la géographie de Fox News, décident les plus discrets à pousser leur première note. « Ça y est, on l’a fait ! », s’autocongratule Sébastien, pensant que les riverains attendaient fiévreusement sa chronique du lieu sur Yelp. « Je ne repasserai pas sur ce qui a été dit et redit (voir décrié), je m’attarde uniquement sur ce que j’ai testé, à savoir aller y boire un verre un samedi aprèsmidi. » Ne t’attarde pas trop quand même. NOTE IN MY NAME Oprah Winfrey En accusant une vendeuse d’une boutique de luxe suisse de racisme (elle avait refusé de lui montrer un sac « trop cher pour elle ») , la présentatrice américaine a fait une très mauvaise pub aux Trois Pommes – qui ne devait sûrement pas savoir que la deuxième fortune de l’entertainment US avait fait décoller les actions Seb en bourse juste en vantant les mérites de la friteuse Actifry. a 4 Eux aussi, à leur manière, ils ont donné une note à une boutique. Ça ne vous rappelle personne ? Vous, quand, ivre de vin rouge et de vous-même, la bouche pleine de houmous, vous interrompez la conversation pour donner votre avis sur le dernier single d’Adele. Alors que vous êtes restée parfaitement muette quand vos amis tentaient de résoudre le conflit israélo-palestinien en s’enfilant de la burrata. #lesvraisproblèmes En faire des caisses Le 15 octobre dernier, s’éteignait, à 63 ans, l’idole de tous les commentateurs en ligne. Harriet Klausner, ancienne bibliothécaire de Pennsylvanie, avait rédigé trois jours avant, sa 31 014 e critique de livre sur Amazon. L’auteur John Scalzi lui a rendu hommage sur Twitter « Harriet Klausner nous a quittés. Elle a critiqué beaucoup de mes livres, et elle en a peut-être même lu certains. RIP, Harriet. » La pasionaria faisait évidemment partie du Hall of Fame d’Amazon, club des critiques les plus actifs du site, dont l’équivalent sur Yelp est La brigade d’élite Yelp, des gens qui ont trouvé un sens à leur vie en donnant leur avis en ligne. Ça ne vous rappelle personne ? Votre copine qui ne savait même pas saler un plat, il y a trois mois, et qui règne désormais sur une cuisine mieux équipée que le PC sécurité de l’Élysée. Tout ça parce que son mec lui a offert un livre de cuisine et qu’elle est trop vaniteuse pour faire un simple poulet au curry. Résultat : elle se fait livrer du chou en lanière du Penjab et ses amis craignent qu’elle se radicalise et rejoigne Top Chef. Rohff Parce qu’il n’était pas trop fan d’Ünkut, la marque de fringues de son meilleur ennemi Booba, le rappeur (accompagné de quelques amis choisis) avait déboulé pour un remake de Fight Club dans sa boutique. Pris par l’ambiance, ils avaient notamment plongé un vendeur dans le coma à coups de caisse enregistreuse sur la tête. En même temps, entre ça et une casquette Ünkut… photoS : getty ; corbis ; rex |