PHOTOS : DR Xoxoxoxo DRAKE S’INSPIRANT LARGEMENT DE L’UNIVERS DE JAMES TURRELL POUR SON CLIP HOTLINE BLING maintenant chacune de ses saillies. Sauf que, avant qu’il pèse 6 millions de followers, qu’il signe un contrat avec une agence de mannequin ou avec la société de production qui représente George Clooney, personne n’avait songé à lui chercher des poux dans cet infâme catogan vertical qui lui orne le crâne. Ce qu’on reproche à The Fat Jewish ? C’est d’avoir capitalisé. « La question du plagiat devient cruciale dans les années 70, 80, avec le développement du sample, explique François Aubart, critique d’art. Les labels réalisent que des gens se font de l’argent avec leurs disques et les procès se multiplient. » Alors que les produits culturels ont longtemps été libres, l’économie de marché les a transformés en « propriété ». Disney, qui pompe allègrement dans les mythes et les contes, n’a ainsi pas hésité à s’en prendre à une société de production anglaise qui se serait un peu trop librement inspirée de Rebelle. « Si aujourd’hui Picasso voulait réaliser ce qu’il a fait, à savoir copier ses pairs, en se les appropriant, il aurait une armada d’avocats à ses trousses », s’amuse la sociologue des usages numériques Laurence Allard. LA CULTURE DU REMIX Pourtant, face à ces accusations de réappropriation discrète, les artistes ont choisi de la jouer profil haut. En y opposant leur mépris, comme Beyoncé ou Michel Foucault. La première balançant sa ponytail sous-titrée « j’ai 17 grammy et je pèse 115 millions de dollars, qui ai-je besoin de voler ? ». Le second se moquant d’être plagié avec cette saillie digne d’une Cookie Lyon : « Quel nom dites-vous ? Attali. Mais qui est ce monsieur ? Il a écrit un livre ? » Ou en jouant la carte de la transparence comme Mika (qui assume s’être inspiré de Sarà Perchè Ti Amo pour son dernier tube), ou KarlLagerfeld (se décrivant lui-même comme un « vampire buvant le sang des autres »). L’idée d’assouplir les règles du copyright commence 5 2 IS3L7A.LS3 « SE LAISSER REMIXER PARTICIPE À SA PROPRE POPULARITÉ » d’ailleurs à germer au sein des instances de l’Union européenne (chez des gens importants quoi). Neelie Kroes, commissaire en charge de la stratégie numérique critiquait en 2012 des lois obsolètes. Boom. Et si vous n’êtes pas convaincus, pensez à Top Chef : « Il y a des secteurs qui ne sont pas soumis au copyright et qui s’en sortent très bien, rappelle Lionel Maurel. Regardez les recettes de cuisine ! » C’est vrai que quand vous servez votre célèbre couscous, vous ne créditez jamais votre mamie Zorah. Pourtant, avec 14,5 millions de livres de recettes vendus en 2010 et le nouveau branding des chefs, le secteur se porte à merveille. Idem du côté de la mode, qui n’est pas soumise au copyright aux États-Unis. Selon la chercheuse Johanna Blakley, l’industrie tient son succès à la force de la copie. Des enseignes font leur chiffre d’affaires sur l’imitation de grands créateurs, mais pour des cibles différentes. En clair, le plagiat est mort, vive le remix. « Sur le Web, on s’exprime par des contenus qui ne sont pas les nôtres, en les partageant ou même en les modifiant, sans en citer la source », explique Laurence Allard. On parle en screenshot, que l’on use et abuse des fonctions « partage » sur les réseaux sociaux et que l’on répond à nos mails avec des GIF animés 0% crédités. « En 2012, Lady Gaga avait organisé un concours de remix à l’occasion de la sortie de l’album Born This Way en France et de la tournée, rappelle Laurence Allard. Se laisser remixer participe à sa propre popularité. » Des internautes reprochent à Drake d’avoir pompé l’univers de l’artiste James Turrell, 72 ans (Drake l’adore) pour son clip ? L’artiste a l’air ravi ! Son titre serait copié sur Cha Cha, du rappeur D.R.A.M. ? Drake avait déjà annoncé que son titre était la version rap de Cha Cha. Tout Internet remixe le clip en faisant de Drake un mème ? Le chanteur se hisse en 2 e position du Top Billboard Hot 100. Tout le monde a copié tout le monde, et pourtant tout le monde est content. LA MÉMOIRE QUI FLANCHE Oups. Vous avez oublié que l’idée que vous êtes en train de proposer en réunion devant votre collègue à la mine déconfite n’était pas la vôtre, en fait (ben non, c’était la sienne). Si la cryptomnesie n’a pas marché, trois autres excuses scientifiques pour vous en tirer. LE STRESS Selon une étude de l’université de l’Iowa, les pics de cortisol (l’hormone du stress) peuvent avoir des effets sur la perte de mémoire. Vous étiez stressée par la réu’, donc vous avez oublié que l’idée n’était pas de vous. CQFD. LA CONFUSION DES SOURCES Comme Ronald Reagan qui racontait régulièrement l’histoire d’un héros de la Seconde Guerre mondiale qu’il aurait décoré pendant sa campagne présentielle (alors qu’il avait juste vu cette scène dans un film), le cerveau peut parfois confondre les souvenirs, surtout en cas de stress ou d’événement traumatiques (bon, et dans le cas de Reagan, d’un Alzheimer rampant). L’EFFET MOTEUR DE RECHERCHE En 2011, une étude de l’université de Colombia révèle ce que tout le monde avait pisté depuis un bon moment : les internautes ont tendance à faire moins d’effort de mémorisation puisqu’ils savent qu’ils retrouveront les infos sur Google. Depuis, votre ordi est devenu le disque dur externe de votre cerveau. MIV//t fi/1 |