Xoxoxoxo TAYLOR SWIFT AURAIT PIQUÉ LES PUNCHLINES DE JESSE GRAHAM JELENA KARLEUSA ACCUSE BEYONCÉ DE COPIER SES LOOKS 5 0 PLAGIAMANIA Laurent Baffie, loleur populo du PAF, accusé par le philosophe de France Culture Raphaël Enthoven d’avoir chipé des anagrammes au compositeur Jacques Perry-Salkow pour son Dictionnaire des noms propres (ou presque). Taylor Swift accusée par Jesse Graham (ne feignez pas de savoir qui c’est, il est inconnu) de lui avoir volé ses meilleurs punchlines pour Shake It Off. Et même une popstar serbe accusant Beyoncé (encore elle) de lui piquer ses looks. Les accusations les plus inattendues se copient-collent au fil des semaines. À ce train-là, l’Homo Erectus qui a inventé le feu va bientôt nous demander de le créditer quand on s’allume une clope. « C’est vrai que les affaires sont prospères », commente la star du barreau de la propriété intellectuelle, Emmanuel Pierrat. Dans les médias, au moins un cas sort par semaine, de la simple accusation au procès médiatisé. « Il y a une surenchère incroyable, confirme Lionel Maurel, juriste/blogueur qui traque les dérives du copyrighting dans sa chronique en ligne Copyright Madness. NONA GAYE, FILLE DE MARVIN GAYE LORS DU PROCÈS BLURRED LINES BLURRED LINES DE PHARRELL WIILIAMS ET ROBIN THICKE SERAIT UN PLAGIAT THE FAT JEWISH REPREND À SON COMPTE LES BLAGUES DES INTERNAUTES On en vient à créditer des blagues sur Instagram et j’ai même relayé l’histoire de policiers qui voulaient un copyright sur des vidéos de caméras de surveillance. » Aussi étonnant : mi-novembre, Zoé de las Cases, décoratrice parisienne, accuse Airbnb d’avoir plagié la déco de son appart du 17 e pour ses bureaux de San Francisco. Et les tribunaux sont loin de décourager cette chasse à l’imitation. En mars dernier, la justice américaine a condamné Pharrell Williams et Robin Thicke à verser 7,4 millions de dollars aux héritiers de Marvin Gaye pour avoir « copié » Got to Give Up avec le titre Blurred Lines. Fait rarissime, les juges ont considéré qu’il y avait violation de droits d’auteur sur le style. Résultat, les professionnels de la musique s’inquiètent d’un Blurred Lines effect : une multiplication des procès à la moindre ressemblance et la condamnation pure et simple de l’inspiration. Ce que montre ce verdict, c’est que nous sommes passés de l’ère de « qui a la bonne idée » à « qui l’a dégainée en premier ». « Les affaires borderline, qui se lancent sur une simple ressemblance, se multiplient, observe Lionel Maurel. Les règles du droit d’auteur créent le flou. Leur appréciation est subjective, donc autant tenter sa chance. » LE FRIC A TUÉ L’INSPIRATION Plagiat ? Vol d’idée ? Inspiration ? Les artistes eux-mêmes finissent par s’embrouiller. Il n’y a qu’à voir le regard vide de Pharrell Williams dans les vidéos de son audition au procès qui ont fuité sur Internet. Tellement paumé qu’il ne sait plus vraiment dire si, oui ou non, il pensait à Marvin Gaye en se rasant le matin. « Le flux d’images et d’informations auquel nous sommes soumis modifie notre mémoire et notre manière de créer, souligne Julie Boukobza, curatrice qui chapote la résidence 89+ au Lab de l’institut culturel de Google à Paris, composé de jeunes artistes nés après 1989. Les sources sont si nombreuses qu’on en vient à les oublier et à créer à partir de quelque chose que l’on aurait pu déjà voir ou entendre, mais sans vraiment le savoir. » C’est la cryptomnésie décrite par CarlJung. Sauf que, dans une époque où règnent les attention-whores avides de likes, ce qui n’était que le processus logique d’une blague et de la culture orale (être entendu et répété sans être crédité, bigup Toto), devient un véritable casus belli gravé dans le marbre d’Internet. Au point que fin juillet, Twitter s’est décidé à bloquer les tweets des internautes qui pompent ceux des autres sans les créditer. Et on n’était pas loin d’assister à l’Affaire Dreyfus du XXI e siècle quand tout le monde est tombé sur The Fat Jewish, sorte de Pierre Desproges de la pop culture (en plus gros). Accusé de plagier les blagues sur les réseaux à grande échelle, Josh Ostrovsky (son vrai nom) a fini par battre en retraite et crédite PHOTOS : AFP ; GETTY ; REX ; DR |