FAITS & PERSPECTIVES L’équipe de Patricia Dupuy, spécialiste de l’analyse de sûreté des réacteurs, examine la protection des centrales contre de telles agressions (lire glossaire p.6). Elle étudie les effets d’une inondation sur un site – par exemple, le bouchage d’une prise d’eau par des débris charriés par une crue –, les équipements à protéger, les dispositions matérielles, procédures et systèmes d’alerte prévus… « Nous expertisons les dossiers de l’exploitant sur ces sujets. Par exemple, lors des réexamens de sûreté, tous les dix ans, ou après des événements marquants comme celui du Blayais », détaille-t-elle. En 2013, édition du « guide inondations » En 2003, des crues exceptionnelles affectant des installations de Tricastin (Drôme et Vaucluse) ont nécessité une meilleure prise en compte des risques d’inondation. Un groupe de travail piloté par l’IRSN et l’ASN et regroupant des experts du domaine a proposé une révision de la RFS. Ce qui a abouti à l’édition par l’ASN, en avril 2013, d’un Guide inondations, relatif à la protection des installations nucléaires de base contre les inondations externes. Les équipes de l’IRSN AILLEURS 8 I Repères N°26 I Octobre 2015 3 questions à… William Fatoux Chargé de site IRSN de la centrale de Gravelines Quelle est la situation de Gravelines par rapport aux risques d’inondation ? La centrale est située en bordure de la Mer du Nord. À la conception, la plateforme de la centrale a été calée à un niveau supérieur à la cote majorée de sécurité (CMS). En 1979, à la suite de la réévaluation de la CMS, des dispositifs anti-inondation ont été mis en place le long du canal d’amenée. La CMS a été réévaluée en 1997 à un niveau légèrement inférieur et la revue REX Blayais a confirmé cette valeur, applicable à ce jour. À quelles modifications a conduit la démarche REX Blayais ? Il a été décidé d’adopter une marge de 20 cm supplémentaire pour le dimensionnement des protections physiques. Le muret bordant le canal d’amenée a été surélevé. Des protections ajoutées au niveau de l’accès est. D’autres modifications ont-elles été entreprises ? Oui, à la suite de la prise en compte de nouveaux aléas. L’aléa « pluie régulière continue », associé à un niveau de la mer élevé, pourrait conduire à des débordements des stations de relevage du réseau d’égouts. Des modifications ont été réalisées pour permettre le fonctionnement de ces stations quel que soit le niveau de la mer. Les matériels importants pour la sûreté des réacteurs sont dans des locaux étanches. La conduite à tenir par les opérateurs en cas d’inondation externe a été définie dans un document spécifique. ri www Pour en savoir plus La centrale de Sainte Lucie, en Floride La centrale nucléaire de Sainte Lucie, en Floride. D. Ramey Logan examinent comment l’exploitant EDF applique les nouvelles consignes de ce guide. À la suite de l’accident de Fukushima, en 2011, l’ASN a demandé aux exploitants, lors des Évaluations complémentaires de sûreté (ECS), de s’assurer de la robustesse des installations pour des inondations plus extrêmes. Les retours de ces ECS n’ont pas remis en cause les principes édictés dans le guide, mais conduiront à de nouveaux renforcements de la protection des centrales. Rapport sur l’inondation du site du Blayais survenue en 1999 (IPSN, 2000) paru le 17 janvier 2000. www.irsn.fr/blayais99 Rapport sur l’aléa inondation- État de l’art préalable à l’élaboration du guide inondation pour les installations nucléaires, cosigné par 15 établissements publics scientifiques et entreprises. www.irsn.fr/alea-inondation Guide de l’ASN relatif à la protection des installations nucléaires de base contre les inondations externes (ASN, 2013). http://professionnels.asn.fr Le 9 janvier 2014, le réacteur n°1 de la centrale de Sainte Lucie, aux États-Unis, fonctionnait à 100% de sa puissance quand le site a fait face à des pluies exceptionnelles. Ces précipitations ne dépassaient pas les valeurs retenues à la conception des installations, mais le système de drainage des eaux pluviales était dégradé. L’eau a pénétré dans le bâtiment des auxiliaires nucléaires par deux conduits endommagés. Ces derniers n’étaient pas conçus pour faire face à une inondation. L’inondation a affecté l’ECCS – le système d’injection de sécurité dans le circuit primaire pour refroidir le cœur. Les opérateurs ont évacué l’eau par un système d’exhaure hors du bâtiment sans qu’il y ait de conséquence réelle pour la sûreté. Un examen a révélé quatre autres conduits non équipés de protection, défauts non mis en évidence par l’inspection deux ans auparavant. Des mesures correctives ont été réalisées depuis. Les enseignements de cet épisode complètent ceux de Fukushima dans le cadre de la révision du « Guide d’évaluation contre les inondations externes », menée par la Commission de régulation nucléaire des États-Unis (US.NRC). DR |