» > toutes les ondes et trajets possibles dans la structure et dans les bonnes proportions (on parle alors d’équipartition du champ d’onde), et que l’opération de corrélation permettait d’extraire (de filtrer) uniquement l’information correspondant à la propagation entre les deux récepteurs. On reconstitue ainsi la fonction de Green entre les deux points de mesure. L’idée de reconstruire une information déterministe utilisable pour l’imagerie à partir de signaux chaotiques et dont les sources sont modélisables par des processus aléatoires, avait déjà été abordée en sismologie, principalement de manière théorique, dès la fin des années 1950. L’héliosismologie a également exploré et appliqué au Soleil, avec succès, ce type d’approche dans les années 1990. Une expérience similaire à celle du bloc d’aluminium décrite plus haut est présentée en figure 2a. Un champ complexe d’ondes élastiques est généré à partir d’un jet d’air comprimé à la surface d’une plaque d’aluminium pendant quelques secondes. Une ligne de récepteurs enregistre le signal sur un temps long. La figure 2c montre le résultat de la corrélation de l’enregistrement mesuré par un récepteur de référence en extrémité de ligne (r 0) avec ceux mesurés par tous les autres récepteurs. Des ondes (dites de Lamb) directes et réverbérées sont clairement visibles à la surface de la plaque. Après corrélation, tout se passe comme si une source avait été déclenchée à la position du récepteur de référence r 0. Dans cette représentation en temps et distance, on peut par exemple mesurer très facilement la vitesse (et la dispersion) de l’onde dans la plaque. Ce résultat est transposable à la surface de la Terre, comme expliqué dans la section suivante. On peut noter que plusieurs réalisations de l’expérience (excitation de la plaque, corrélation des enregistrements) doivent être moyennées pour atteindre un résultat exploitable. La corrélation de bruit en sismologie : des applications devenues standard Pour transposer à la Terre l’expérience du bloc d’aluminium de Lobkis et Weaver, Campillo et Paul [3] ont d’abord montré que les ondes de surface qui forment l’essentiel de la fonction de Green entre 14 Reflets de la Physique n°64 des sismomètres distants de plusieurs dizaines de kilomètres peuvent être reconstruites par corrélation de la coda, train d’ondes diffuses visible après la partie principale (balistique) des signaux émis par un séisme, et dont l’énergie décroit rapidement avec le temps. Une étape importante a été franchie lorsque ce même résultat a été obtenu en utilisant non pas la coda des enregistrements de séismes, mais les vibrations naturelles et perpétuelles de la surface du sol qui forment le bruit sismique ambiant. Alors qu’il avait toujours été considéré comme nuisible pour la détection et l’étude des séismes, le bruit sismique ambiant est devenu, grâce à la corrélation, Excitation par jet d’air comprimé a 0 0 Temps (ms) c 1,5 1 0,5 0 r 200... r r 1 0 plaque d’aluminium 1m une source d’énergie universelle, stable dans le temps et gratuite, permettant d’étudier la structure de la Terre [4]. Le bruit sismique ambiant a de multiples origines selon la gamme de fréquences considérée. Aux fréquences supérieures à 1 Hz, le bruit est dominé par des processus locaux à régionaux, anthropiques (infrastructures urbaines, activités industrielles, etc.) et/ou météorologiques (vent, pluie, etc.). En deçà de 1 Hz, le bruit est très largement dominé par l’interaction de l’océan avec la Terre solide. Son contenu fréquentiel est dominé par deux pics caractéristiques vers 0,07 Hz et 0,14 Hz : ces deux pics, dits microsismiques, corres 10 secondes d’enregistrement 1 an d’enregistrement 60 Réverbérations Onde directe 0 20 40 60 80 50 100 150 Distance (cm) d Distance (deg) Temps (min) 50 40 30 20 10 Réverbérations Onde de surface surface Onde Onde S directe directe Onde P directe 2. Expériences réelles de corrélation du champ d’ondes ambiant : (a et c) à l’échelle du laboratoire, (b et d) à l’échelle de la Terre. (a) Génération et détection d’ondes élastiques à la surface d’une plaque d’aluminium ; les capteurs sont représentés par des triangles rouges. (b) Distribution des stations sismiques (points rouges) à la surface de la Terre. (c et d) Variations temporelles des fonctions de corrélation, classées selon la distance à un récepteur de référence (r 0 dans le cas de la plaque). L’amplitude est représentée en niveaux de gris. L’axe du temps correspond à l’axe du retard dans la figure 1. Dans les deux cas, la fonction de corrélation converge vers la réponse élastodynamique du milieu (une plaque d’aluminium ou la Terre). Sources : (c) Ludovic Moreau. (d) Modifié de Boué et al. [6]. b |