Le Système international d’unités redéfini Lucile Julien (lucile.julien@lkb.upmc.fr) Laboratoire Kastler Brossel (Sorbonne Université, CNRS, ENS-Université PSL, Collège de France), 4 place Jussieu, 75005 Paris Le Système international d’unités (SI) est fondé sur sept unités de base qui sont le mètre (m), le kilogramme (kg), la seconde (s), l’ampère (A), le kelvin (K), la mole (mol) et la candela (cd), respectivement unités de longueur, de masse, de temps, de courant électrique, de température, de quantité de matière et d’intensité lumineuse. Toutes les autres unités du SI sont des unités dérivées, qui se déduisent de ces unités de base. 12 Reflets de la Physique n°62 Le choix et la définition des unités de base sont fixés par convention entre les États membres du BIPM. Ils font l’objet d’un accord écrit, qui s’accompagne ensuite de ce qu’on appelle des mises en pratique. La mise en pratique d’une définition est une série d’instructions, en général discutée par un comité consultatif avant d’être publiée par le BIPM, qui permet la réalisation concrète de cette définition, avec les meilleures qualités métrologiques possibles. Pour la dissémination des unités et l’étalonnage des appareils de mesure, on réalise des étalons : ce sont des artefacts matériels ou des dispositifs expérimentaux qui matérialisent l’unité d’une grandeur physique, avec une valeur connue et une exactitude qui peut être plus ou moins grande. À l’occasion de la redéfinition de quatre d’entre elles, entrée en vigueur le 20 mai 2019, les sept unités de base du SI ont vu leur définition reformulée, comme nous allons le voir. Dans l’histoire des unités de mesures, ce n’est pas la première fois qu’une définition est modifiée, mais la refonte actuelle du SI est d’une ampleur particulièrement exceptionnelle. Nous donnons ci-dessous des exemples de définitions successives de certaines unités, ce qui est l’occasion de retracer brièvement l’histoire du SI et ses origines. Du système métrique au système MKSA Le système métrique décimal est né en France pendant la Révolution. À l’occasion des États généraux de 1789, le roi Louis XVI demande que des cahiers de doléances, ouverts dans toute la France, recueillent les vœux et suggestions de tous les habitants du royaume. Partout dans ces cahiers, on demande qu’il n’y ait plus « deux poids, deux mesures » : cette expression est restée dans le langage courant. En effet, non seulement chaque région possédait alors son propre système de mesures, différent pour chaque type de métier, mais la même unité pouvait avoir différentes variantes (toise de Charlemagne, toise du Châtelet, toise du Pérou...), ce qui était facilement source de tromperies dans les échanges commerciaux. En outre, la variété des subdivisions des différentes unités (par 20, par 12, par 8, par 6, par 3...) rendait les calculs extrêmement difficiles et inaccessibles à beaucoup de personnes. Le 9 mars 1790, Talleyrand propose à l’Assemblée nationale un « Mémoire sur la nécessité de rendre uniformes dans tout le Royaume, toutes les mesures d’étendue et de pesanteur ». Il faut entendre par là les mesures de longueur et de poids, ce dernier n’étant alors pas distingué de la masse dans le langage commun. L’idée est de définir de nouvelles unités qui soient universelles, c’est-à-dire qui ne tiennent « à aucun climat, ni à aucune nation particulière ». Pour l’unité de longueur, le choix se porte sur le mètre, défini comme la dix-millionième partie du quart du méridien terrestre. L’unité de masse en est déduite, comme celle d’un décimètre cube d’eau distillée. La loi du 18 germinal de l’an III (7 avril 1795) institue le système métrique décimal. |