» > Les conditions de gestion d’un site d’extraction sont aujourd’hui réglementées, avec l’introduction d’un régime d’inspections et de contrôles réglementaires et administratifs effectués sous l’autorité des préfets par les Directions Régionales de l’Environnement. Ce dispositif permet de réduire la possibilité que des objectifs politiques ou économiques influencent les décisions réglementaires. On est donc passé d’une planification pratiquement inexistante à des procédés de traitement des effluents à plusieurs étapes et des systèmes de gestion conçus spécialement pour la filière. Si l’impact radiologique semble donc aujourd’hui plutôt maitrisé dans les anciens sites miniers français, aujourd’hui fermés, Pierre Barbey rappelle que l’impact sur l’environnement est également de nature chimique. À commencer par l’uranium lui-même qui, s’il est certes un élément radioactif, est tout d’abord un élément chimique très toxique. C’est d’ailleurs sur la base de sa toxicité chimique que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a fixé une limite en concentration en uranium de 15 µg/l pour les eaux potables. Il faut noter cependant que l’établissement de limites et recommandations basées sur la toxicité n’est pas une affaire facile. Une des difficultés de cet exercice, s’agissant des anciens sites de mines d’uranium, est que les substances toxiques extraites ou produites sont d’origine naturelle et que l’action anthropique s’ajoute à un bruit de fond naturel, lui-même fluctuant. Pour apprécier l’impact dosimétrique et aider à la fixation de limites, l’OMS a choisi d’estimer les transferts des polluants toxiques dans l’environnement et de prendre en compte l’ensemble des voies d’atteinte de l’homme selon des scénarios d’exposition s’appuyant sur des modes de vie. Un dernier élément important à souligner quant à l’impact environnemental des sites miniers est que leur réhabilitation après le démantèlement des installations est une activité industrielle à part entière mais complexe. L’État français a confié à Areva (désormais Orano) la gestion et la surveillance des anciens sites miniers français, y compris ceux qu’il n’a pas exploités. Le réaménagement des sites vise en priorité à limiter l’impact résiduel des activités passées : sécuriser les installations pour le public, assurer la surveillance 20 Reflets de la Physique n°60 radiologique et environnementale, assurer le traitement des eaux pour les sites qui le nécessitent. Une centaine de spécialistes sont ainsi mobilisés chaque année pour réaliser près de 7 000 analyses environnementales, géologiques, radiologiques et sanitaires. Après l’extraction de l’uranium, vient la problématique de son transport. Les difficultés principales liées au transport de substances radioactives sont le risque d’inhalation ou d’ingestion de particules radioactives, le risque d’irradiation externe, et la contamination de l’environnement. Environ 10% des colis nucléaires transportés en France sont en lien avec l’industrie électronucléaire et cela représente environ 19 000 transports annuels, pour 114 000 colis (e). Les déplacements des marchandises dangereuses par transport routier, ferroviaire ou maritime sont réglementés par les autorités nationales. Le colis doit apporter par lui-même une protection suffisante pour éviter les conséquences d’un accident sur la population et l’environnement. La substance radioactive est enfermée dans des futs en acier étanches chargés dans des conteneurs certifiés par l’Organisation Internationale de Normalisation (ISO) avec le marquage et la signalisation appropriée. Par conséquent, en situation non accidentelle, le transport des matières nucléaires ne semble pas présenter un impact spécifique sur l’environnement et les populations. Du réacteur jusqu’aux déchets En fonctionnement non accidentel, l’impact d’une centrale nucléaire sur l’environnement est essentiellement lié aux rejets thermiques, chimiques et radioactifs qui exposent les travailleurs du nucléaire et le public. Les rejets industriels liés à la filière nucléaire ne sont pas très différents de ceux produits par toute autre centrale thermique. Pour autant, l’après-Tchernobyl a vu la création, sous la pression de l’opinion publique, d’instances de contrôle indépendantes, l’Autorité de sureté nucléaire (ASN) et l’Institut de radioprotection et de sureté nucléaire (IRSN), dans le but de gérer l’ensemble des risques nucléaires (électronucléaire, médecine, etc.). L’ASN participe à l’élaboration de règles relatives à l’énergie nucléaire, et surveille leur bonne exécution, alors que l’IRSN coordonne des recherches en liaison avec la sureté nucléaire et garde mémoire des retours d’expérience effectués dans les centrales. Avec l’exploitant, ces deux institutions participent ainsi aux visites décennales destinées à évaluer si une centrale peut ou non continuer à être exploitée, à effectuer des contrôles et à confirmer le niveau de sureté de l’installation. Enfin, l’ASN définit les limites règlementaires concernant tous les rejets qu’une centrale nucléaire est autorisée à émettre en exploitation. En particulier, l’exploitation des centrales nucléaires entraine notamment une production d’eaux et de gaz usés et de chaleur. En France, il existe des limites règlementaires pour éviter un réchauffement local trop important de la source froide (fleuve, rivière, mer) car l’eau prélevée est restituée à une température légèrement supérieure à sa température de prélèvement. En conséquence, la production doit être diminuée ou suspendue si l’eau restituée est trop chaude par rapport au débit de la source froide (effet de dilution). Pour ce qui est des rejets radioactifs, Claude Stéphan rappelle qu’au cours des vingt dernières années, le parc nucléaire d’EDF a divisé par un facteur supérieur à 100 l’activité de ses rejets radioactifs hors gaz rares, tritium et carbone 14. Dans ce dernier cas, l’émission dans l’environnement de cet isotope est extrêmement faible et, comme en outre elle se fait essentiellement sous une forme (le méthane) qui n’est pas assimilable par les végétaux, elle ne constitue qu’environ 1% du bruit de fond moyen mesuré. L’impact épidémiologique sur les populations vivant à proximité des centrales nucléaires françaises est considéré comme non significatif. Cependant, de nombreuses associations de riverains surveillent avec attention et inquiétude l’évolution des niveaux de radioactivité dans les sols et les eaux des nappes phréatiques (f). La dose annuelle d’irradiation maximale autorisée pour les travailleurs du nucléaire est de 20 millisievert (g), soit un peu plus de quatre fois la dose d’irradiation naturelle. Dans les faits, le niveau de radiation subi est bien inférieur et le nombre de dépassements de ce seuil se réduit chaque année. Cette dose d’irradiation est-elle dangereuse ? La question reste ouverte. |