b 28 Reflets de la Physique n°58 a 3. Figures de croissance extraites de La Biologie Synthétique [2]. a. Karyokinèse artificielle obtenue par diffusion dans une solution saline. b. Croissance osmotique de « champignons » artificiels.c. Segmentation en cellules dans une solution de nitrate de potassium 4 t c - 1 brut de matière inanimée qui germe devant nos yeux, […] sans la moindre présence de matière organique. » Si diffusion et osmose suffisent à générer des structures complexes, régulières, et qui plus est ressemblant à celles du vivant, pourquoi alors invoquer d’autres « forces mystérieuses » ? « La vie est un phénomène dont le mécanisme ne peut être que purement physique ; elle est produite par les mêmes forces, régie par les mêmes lois qui agissent sur le monde non vivant. […] Le problème de la biologie, c’est de comprendre le jeu des forces physiques sur la matière des êtres vivants » [2]. Leduc remplace ainsi les forces vitales par les forces physiques : « les forces physiques ont des facultés d’organisation infiniment plus grandes que celles qu’avaient osé supposer jusqu’ici les esprits les plus audacieux » [2]. Leduc questionne la spécificité même du vivant : « l’évolution, la nutrition, la sensibilité, la croissance, l’organisation, […] ni même la faculté de se reproduire, n’est l’apanage du vivant », mettant en exergue le flou de la ligne de démarcation entre vivant et inanimé : « Puisqu’on ne peut marquer la séparation entre la vie et les autres phénomènes de la nature, on devrait conclure que cette séparation n’existe pas, ce qui est conforme à la loi de continuité entre tous les phénomènes. Les divisions, les séparations sont faites par l’homme pour se faciliter l’étude de la nature […] » [4]. En cherchant à faire tomber la barrière entre matière vivante et matière inerte, Leduc rencontre une résistance vitaliste farouche, ou du moins une grande réticence à traiter le vivant indistinctement de l’inanimé. Cela lui vaudra en 1906 l’exclusion de ses travaux des Comptes Rendus de l’Académie des sciences. On lui reprochera notamment sa défense du concept de « génération spontanée », théorie définitivement abandonnée depuis les expériences de Pasteur. La génération spontanée revêt pourtant chez Leduc un sens assez différent, se rapprochant plutôt de l’abiogenèse, l’apparition « originelle » de la vie à partir de matière inanimée : « On ne peut admettre que [la chaîne de la vie] soit cassée en quelque point, c’est-à-dire qu’il y ait un lien manquant entre la nature animée et inanimée. C’est pourquoi la théorie de l’évolution admet nécessairement la nature physicochimique de la vie et la génération spontanée » [4]. On lui reprochera aussi de |