Culture scientifique De YouTube à la science-fiction : diffuser la science autrement Lors du 24 e Congrès général qui s’est tenu à Orsay du 3 au 7 juillet 2017, la commission Culture scientifique de la SFP a organisé une session d'affiches et une session semi-plénière. Cette dernière s’interrogeait sur le phénomène des «youtubers», nouveaux venus dans la popularisation des sciences, et sur un autre canal de diffusion des connaissances scientifiques : la science-fiction. « YouTube peut être considéré comme complémentaire à l’enseignement traditionnel, qui ne saurait être remplacé lorsqu’il s’agit de l’acquisition de connaissances de base et de l’indispensable démarche scientifique. » Références 1 www.sfp2017.fr/data/pages/Posters_CSabstracts_num.pdf 2 www.moatti.net 3r. Lehoucq, Faire des sciences avec Star Wars, Le Bélial (2017). 4 www.florenceporcel.com 5 https://sciencetonnante.wordpress.com 6 F. Porcel, L’espace sans gravité, Marabout (2016) ; La folle histoire du système solaire, Dunod (2017). 7 D. Louapre, Mais qui a attrapé le bison de Higgs ?, Flammarion (2016) ; Insoluble mais vrai, Flammarion (2017). 8 À ce sujet, la prochaine Journée « Sciences et Médias » organisée par la commission Culture scientifique de la SFP, le 11 janvier 2018, aura pour thème « Comment lutter contre la désinformation scientifique ». 30 Reflets de la Physique n°55 L’objectif de la session d’affiches était de permettre à des physiciens acteurs de la vulgarisation et de la diffusion scientifique d’illustrer leurs activités dans ce domaine. La plupart des quatorze affiches étaient accompagnées d’expériences sur table (fig. 1), qui ont connu une importante affluence, dénotant ainsi l’intérêt porté par notre communauté à la promotion de la science auprès du grand public et des élèves et étudiants. Le spectre couvert allait du magnétisme à l’astronomie, en passant par l’optique et les plasmas. Certaines affiches présentaient également des activités multidisciplinaires conduites en région. Les résumés des affiches sont disponibles sur le site du congrès général [1]. Près d’une centaine de personnes participaient à la session semi-plénière, dont l’objectif était de mieux cerner l’importance des vecteurs originaux que sont les chaînes YouTube et la science-fiction pour la diffusion de la culture scientifique. Après une présentation des activités de la commission faite par son président, Daniel Hennequin, la parole a été laissée aux quatre intervenants, puis à la salle sous la forme d’une table ronde. La première intervention avait pour titre « Typologie des vidéos internet de culture scientifique ou générale ». Alexandre Moatti [2], chercheur associé en histoire des sciences à l’université Paris-Diderot, développe l’idée phare que toute culture générale devrait être scientifique, et en particulier s’appuyer sur une démarche et une méthode pertinentes. L’historique de l’apparition du phénomène YouTube conduit à s’interroger sur le rôle de l’action publique (universités, institutions culturelles, médias publics...) face à l’irruption de ces vidéos au cours des dix dernières années : peut-on encore penser en dehors de YouTube ? Si la France a bien été pionnière en matière de médias audiovisuels au début des années 2000 (Canal-U, Gallica, UTLS...), ce n’est malheureusement plus le cas aujourd’hui, et force est de constater que beaucoup de vidéos de référence produites à la fin du siècle passé, en science ou en culture générale, ne sont plus aujourd’hui accessibles aussi facilement que le sont les vidéos YouTube. C’est ainsi que, par exemple, certains enregistrements archivés par l’INA sont payants, et que les émissions et conférences de France Culture ne peuvent être téléchargées que pendant un an. S’agissant du contenu, on peut regretter le manque de rigueur, de méthode, et de densité des vidéos YouTube, par comparaison avec celles auxquelles il est fait référence ci-dessus : la plupart des séquences YouTube se caractérisent par une faible structuration théorique au bénéfice du seul énoncé des faits, visant au bien-être scientifique plutôt qu’à la rigueur. D’aucuns, notamment aux États-Unis, sont même allés jusqu’à les qualifier de «placebo science». A fortiori, elles ne sauraient en aucun cas remplacer l’enseignant. Roland Lehoucq, astrophysicien au CEA, bien connu pour son travail de vulgarisation et de réflexion s’appuyant sur la sciencefiction [3], introduit son intervention, « Peut-on pratiquer les sciences avec la science-fiction ? », par un historique remontant à Jules Verne. Dès 1865, année de parution du roman De la Terre à la Lune, ce pionnier de la science-fiction tient déjà à appuyer ses œuvres sur de la « vraie » science, avec pour corollaire que toutes ses prédictions ont fini par se réaliser. Il en est de même d’ArthurC. Clarke, qui imagine dès 1945 les premiers satellites géostationnaires de télécommunications. D’autres auteurs ont basé leurs œuvres sur des considérations plus spéculatives, comme |