» > Ce résultat a été simulé à l’aide de modèles couplés climat-carbone grâce à la thèse de Yannick Donnadieu, en collaboration avec Yves Godderis et moi-même [4]. Les résultats en terme de température et de CO 2 atmosphérique sont illustrés sur la figure 5. Ainsi, si les cycles de Wilson sont nombreux, la configuration géographique de l’éclatement du Rodinia, qui se fait en zone équatoriale, constitue le contexte le plus favorable possible à l’érosion et in fine à l’effondrement du CO 2 atmosphérique, et précipite le basculement vers une glaciation globale. Paul Hoffman [5] a, pendant des années, documenté les deux grandes phases glaciaires du Néoprotérozoïque : d’abord, la glaciation que l’on appelle « sturtienne » et qui intervient entre il y a 720 et 660 Ma, puis une seconde phase, la glaciation « marinoenne » (voir la figure de gauche, p.7), qui est beaucoup plus courte, entre 650 et 635 Ma. Le lien entre ces glaciations, la fin du Néoprotérozoïque qui s’ouvre sur l’explosion cambrienne (e) et l’évolution du taux d’oxygène dans l’atmosphère, est encore très mal compris. Le climat au tempo de la tectonique des plaques Quittons ces grandes oscillations climatiques pour nous intéresser au Phanérozoïque, période qui va de l’explosion cambrienne à nos jours (fig. 1b). Sur ces échelles de temps de la dizaine à la centaine de millions d’années, le facteur principal de modulation climatique est la tectonique des plaques. En effet, cette tectonique horizontale (dérive des continents) et verticale (orogénèse) va profondément modifier, à l’échelle de dizaines de millions d’années, les bassins océaniques et donc la circulation des masses d’eau, construire des montagnes qui vont modifier la circulation atmosphérique et le cycle hydrogéologique (mousson). Cette idée n’est pas nouvelle, Alfred Wegener et Wladimir Peter Köppen ont, peu après la publication de 1924 [6], pensé au fait que la dérive des continents allait changer aussi les climats des continents et leur végétation. Mais ils n’avaient pas perçu le fait que la tectonique des plaques joue non seulement un rôle direct sur le climat, mais également sur le cycle du carbone et sur le taux de CO 2 atmosphérique. En effet, si la plupart de la masse continentale 12 Reflets de la Physique n°55 se situe dans les tropiques, comme c’était le cas au Néoprotérozoïque, l’érosion silicatée joue à plein et le taux de CO 2 dans l’atmosphére diminue, car ce sont des zones de très fortes précipitations. Par contre, si cette masse se situe près du pôle où le cycle hydrologique est beaucoup plus ténu, il y a peu d’érosion silicatée et le CO 2 peut monter dans l’atmosphère. Cette régulation entre climat et tectonique ne produit, pendant le Phanérozoïque, que très peu de périodes glaciaires. La plupart des périodes géologiques du Primaire et du Secondaire sont chaudes avec de rares exceptions comme au Permo-Carbonifère, il y a 300 millions d’années, où la concomitance d’un continent en position polaire Sud et la relative faiblesse du taux de CO 2 conduisent à un englacement important qui dure quelques dizaines de millions d’années. Variation de température (°C) CO 2 atmosphérique (ppm) 12 8 4 0 1500 1000 500 0 Le Tertiaire (Cénozoïque), une grande descente vers le froid et l’effondrement de la teneur en CO 2 atmosphérique Au cours du Tertiaire, on assiste à une dégradation climatique associée à une baisse du CO 2 [7, 8] (fig. 6). La raison de cette baisse prolongée, de 1200ppm environ à l’Éocène jusqu’à 300ppm environ au début du Quaternaire, a été associée à l’augmentation de l’érosion silicatée due à la formation de l’Himalaya ou à l’enfouissement rapide du CO 2 dans la baie du Bengale [9]. Néanmoins, la cause de cet effondrement du CO 2 et sa quantification restent une énigme. Au cours de ce refroidissement, l’Antarctique de l’Est va s’englacer d’abord il y a 34 Ma, avec un taux de CO 2 de 750ppm environ. L’Antarctique est en position polaire depuis Calotte de glace antarctique Pal. Eocène Olig. Miocène Plio. 60 50 40 30 mi + 4 11, 9 Stomata Phytoplancton Palaeosols Liverworts Bore B/Ca Nahcolite-trona 20 10 0 Age (millions d’années avant aujourd’hui) 6. L’évolution climatique au cours des 60 derniers millions d’années, depuis le Paléocène jusqu’à l’ère préindustrielle. (a) Évolution des différences de température globale. (b) Évolution de la teneur en CO 2 atmosphérique. Ces reconstructions sont basées sur différents indicateurs paléoclimatiques (sigles de couleur). (D’après D.J. Beerling et D.L. Royer, Nature Geoscience 4 (2011) 418-420). a b |