les marchandises vendues dans ses 80 magasins de l’Est francilien. La ville espère aussi surfer sur le chantier du Grand Paris pour accroître le trafic sur la Seine. Cet immense chantier, qui nécessite l’acheminement des matériaux, devrait générer 45 millions de tonnes de déblais dont 8 millions de tonnes pourraient être transportées par voies d’eau. De quoi doper le volume de marchandises sur les barges, qui a déjà progressé de 5% en un an. Reste que si Paris, deuxième port intérieur européen derrière Duisbourg en Allemagne, met aujourd’hui les bouchées doubles pour dynamiser le trafic fluvial, celui-ci ne représente que 8% des tonnages transportés dans la région contre plus de 40% pour les villes des Pays-Bas, « championnes mondiales du trafic fluvial », pointe la chercheuse. Partout, la reconquête des fleuves est aussi liée à des enjeux climatiques et environnementaux. « Les cours d’eau ont un effet rafraîchissant. Les municipalités aménagent leurs abords afin d’offrir des échappatoires aux citadins en cas de canicule », met en avant Marjorie Musy, chercheuse et auteure de plusieurs ouvrages sur les villes durables, pointant les aménagements des berges à Paris pour accueillir les Parisiens en quête de fraîcheur durant les mois d’été. « Dans un monde où les réserves en eau s’amenuisent du fait de la sécheresse qui gagne chaque année du terrain, Singapour a quant à elle déterré son fleuve puis en a limité le débit pour pouvoir retenir le plus longtemps possible les eaux de pluie et créer des réserves », ajoute Denis Bocquet. CAP SUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE De plus, les cours d’eau permettent de faire revenir en ville des oiseaux, poissons et insectes qui contribuent à l’amélioration de la biodiversité, « surtout si les berges sont végétalisées », poursuit la chercheuse. La Ville lumière a retenu la leçon : un jardin flottant de 1 800 hectares, composé de cinq îles reliées par des MARS/AVRIL 112 - PARIS WORLDWIDE MARCH/APRIL 2019 passerelles, a été amarré en amont du pont de l’Alma. Les métropoles, occupées à mettre en œuvre leur politique urbaine durable dont les fleuves sont un des axes forts, commencent à peine à effleurer les prochains défis qui vont s’imposer à elles. Pourquoi, par exemple, ne pas réfléchir au retour, comme au Moyen Âge, d’habitations sur les ponts, comme le propose l’architecte Stéphane Malka ? Le concept taraude de nombreux élus, de Paris à Londres en passant par New York, mais aucun n’est encore passé à l’acte. « C’est la marque d’un grand attachement des villes et des citadins aux fleuves, qui doivent rester accessibles à tous. Mais on peut concilier ports habités et espaces publics en créant non pas des habitations sur l’eau mais des lieux de rencontres et d’échanges, symboles d’une ville ouverte qui regarde de nouveau vers son fleuve », conclut Marc Mimram, dont un des ouvrages, inspiré de cette philosophie, est en cours de construction à Hainan, en Chine. ◆ 1 DR - 2010 LAURENT CLEMENT |