SPÉCIAL COP21 Lessaisons décaléesperturbent la marmotteduMercantour Les espèces protégées de ce parc national des Alpes-Maritimes subissent déjà un dérèglement climatique : l’hiver arrive plus tard et repousse le retour du printemps La marmottedéboussolée La marmotte ne peut se passer de sa prairie. (Photo Robert Chevalier) Le dico de Pt’it Louis Leslacs sont des « super−capteurs » des activitéshumainesetdes changements climatiques. Ils constituent àce titredes « sentinelles » des changements globaux. Le changement global est un phénomène d’étude qui touche le monde entier.Ilregroupe les effets des changements climatiques,mais aussi l’évolution des sociétés humaines et leurs pratiques et ce qu’elles entraînent. Exemples : la pollution, les modes de consommation de l’espace, les usages des sols, la prolifération d’espèces invasives,etc. Il n’y aplus de saison. Ce n’est pas la marmotte du Mercantour, qui dira le contraire. Calée sur le rythme du soleil, dès que les jours diminuent et la température baisse, elle rentre dans son terrier et s’endort pour six mois sur son tapis d’herbes sèches. Elle hiberne. Lorsque les jours rallongent et que sa montagne se réchauffe, elle n’a qu’une hâte : retrouver le grand air. Etlà, c’est le drame. Quand elle sort deson trou en avril, il arrive parfois que la neige recouvre encore son plat préféré : labelle herbe verte. Al’inverse, elle abesoin d’une certaine quantité de neige pour isoler son terrier et se mettre àl’abri des prédateurs. Mais voilà, les flocons n’arrivent pas toujours au bon moment, quand les jours diminuent. Un vrai casse−tête. « Maintenant, il neige différemment, explique Marie Canut, chargée de mission du parc. L’hiver survient fin décembre−début janvier. Iltarde àarriver mais le printemps aussi. Les saisons sont décalées. En 2013−2014, le déneigement aété très tardif et la quantité deneige très importante. Et quand il n’y apas de neige c’est aussi un problème. » La marmotte n’a qu’à déménager, aller vivre plus haut en altitude. Impossible, il lui faut sa prairie actuelle. Au-dessus il n’y aque des éboulis. Les gorgones thermophobes Les lacs d’altitude sous hautesurveillance Le réseau des lacssentinelles géré par le Conservatoired’espaces naturels de HauteSavoie suit l’évolution de certains d’entre eux sur dix, vingt ou trenteans. Dans le Mercantour des thermomètres ont étéplacés àdifférentesprofondeurs sur les lacs du Lauzanier à2284 mètres d’altitude et sur les deux lacs des 2500 mètres. Cela permet de voir dans le temps,les effets de la hausse des températures : comment et àquel rythme l’eause réchauffe,comment va se comporterlacouche glacéequi les recouvresila période de gel diminue, quels seront les effets sur les zooetphytoplanctons. L’observation ne fait que commencer. Bresses Le phénomène du vers changementclimatique se produit trop vite pour que la nature ait le temps de s’adapter. + 4° Cannoncés en Paca, àl’horizon 2071−2100 par rapport àlapériode 1976−2005, si aucune politique climatique n’est menée. Le température moyenne annuelle dans les Alpes a augmenté de +2°C en hiver depuis 1970 et de +1,5°C en été. Moins de jours de gel, moins de neige certaines années, des journées chaudes plus fréquentes, un assèchement des sols...Autant de phénomènes qui entraîneront un bouleversement dans les écosystèmes du Mercantour. La faune et la flore sont menacées à long terme. D’ores et déjà, le décalage des saisons, considéré comme un signe du dérèglement climatique, perturbe plusieurs espèces. Dans le parc national de Port-Cros et Porquerolles au large de Hyères, ces températures ont une incidence sur terre et en mer, où un autre phénomène se conjugue à la hausse des températures : l’acidification des océans. D’autant que la Méditerranée, mer fermée, se réchauffe plus vite que les océans. Dans le monde du silence, les gorgones blanches,thermophobes, souffrent de la chaleur.Elles regardent passer les bancs de barracudas,attirés par la températurede plus en plus chaude de la Méditerranée. Elles ont fait la connaissance de la girelle paon, un poisson tropicalqui, depuis quelques années s’aventuredans les eaux du parcnational de Port-CrosetPorquerolles. La barbe àpapa c’est pas bon ! Le long des rivages une intruse fait de l’ombre àses voisins : l’algue filamenteuse. On la surnomme la barbe àpapa, mais c’est un « poison. » Elle est apparue il ya4ou5 ans, trouvant sans doute une chaleur suffisante pour s’installer. Elle s’incruste auprintemps surtout, se développe et prive desoleil tout ce Le lagopède alpin ne joue plus àcache−cache Le lagopèdealpin est un adeptedes climats extrêmes. Cetoiseau de la famille des perdrix aime prendredel’altitude pour avoir très froid. Ses plumes sont doublées d’un duvet et ses pattes ont des crampons pour marcher facilement sur le tapis neigeux. Quand il fait très froid, il se construit des petits igloos. Il vitet niche au sol.Cen’est pas un hasardsison plumage change de couleur dans l’année.Engros, il est blanc en hiver pour se qui se trouve àproximité provoquant leur dépérissement. En fait, elle fait obstacle aux rayons du soleil, empêchant ses voisines, comme la posidonie, defaire leur photosynthèse. Les cétacés au régime forcé confondreaveclaneige et tromper les prédateurs qui le guettent pour le dévorer. Au printemps,ilvire au gris pour passer inaperçu aux yeux perçants de l’aigle ou du renardsur les zones d’éboulis. Il comptesur son mimétisme pour survivre, mais comment fairesilanature ne suit pas. Plus de neige blanche en hiver quand son plumage est blanc mais de la neige au printemps quand il s’est habillé de gris. Invivable. Parc national de Port-Cros et Porquerolles : les cétacés privés de leur plat préféré La gorgone blanche sous surveillance dans les eaux du parc. (Photo Bernat Hereu) Rorqual croisant au large dePort-Cros. Le krill, dont il raffole, est touché par l’acidification des océans. (Photo IMasinski) nice-matin Jeudi 26 novembre 2015 La lagopède est adepte des hivers rigoureux. (Photo Krause &Johansen) Les cétacés qui croisent tranquillement au large de ces îles protégées risquent eux aussi de pâtir du bouleversement de leur écosystème. Car la Méditerranée, comme toutes les mers du globe non seulement se réchauffe mais s’acidifie. Du coup le krill, uncrustacé microscopique, dont les baleines, rorqual et autres mammifères marins font leur repas, est attaqué. Leur exosquelette est calcaire. L’acidification leur fait lentement, l’effet duvinaigre sur de la craie. Les rorquals devront-ils partir chasser plus loin et s’éloigner définitivement des côtes hyéroises ? Une gorgone rouge recouverte debarbe àpapa. (Photo Jean-Georges Harmelin) X |