aa w journalmetro.com Mercredi 24 mars 2021 OPINIONS eât PATATES FRITES ET PRISON CHRONIQUE IN LIBRO VERITAS FRÉDÉRIC BÉRARD docteur en droit et politologue Une heure du mat. À l’instar de la plupart des soirs de son existence, Eugene Atsu Anaticomplète son quart de travail à l’usine et prend, conformément à son habitude, l’autobus 215, direction Côte-Vertu. À l’arrêt, l’idée lui vient de se rendre au A&W, histoire d’y ramasser un burger. Il commande son truc, le paie, l’obtient. Sur le point de sortir de resto, il lance un œil sur le contenu du sac, et réalise l’absence, ou presque, de frites. Il vire de bord, retourne au comptoir et requiert son dû aux deux employés présents. Banale aa w affaire, me direz-vous. Indubitable, sous réserve toutefois de ceci : dans une société où le racisme systémique gangrène justement le système, chaque geste ou opération insignifiante peut, dans le pire des cas, en appeler à la catastrophe. Comme ici. Les employés en question refusent de lui rajouter des frites à sa portion. Le ton monte. Rien à faire. Il exige alors un remboursement. On l’envoie paître. –Notre caisse est fermée, rien à faire… –Arrêtez de déconner, vous venez tout juste de l’ouvrir devant moi. –Rien à faire, va au diable. Il vire de bord, furax, et emporte son lunch à l’extérieur. Il marche le long du trottoir, penaud, et aperçoit une voiture du SPVM arriver à toute vitesse. On l’arrête aussitôt, menottes et tout le tralala. –Ça va pas la tête ? ! –On a reçu une plainte pour vol qualifié… –Quoi ? ! ? Mais je n’ai pas d’armes sur moi ! Et je n’ai rien volé du tout, j’ai payé mon truc, c’est quoi cette connerie ? On le traîne ensuite au poste de police le plus près, où on le détient jusqu’à 9 heures le lendemain. Il a beau plaider son innocence, gueuler qu’il n’a rien volé du tout, encore moins de manière armée, rien à faire. Il réalise ensuite que lors de son arrestation, il a laissé tomber au sol le sac de A&W, lequel contenait… la facture. Trop tard. –Où m’emmenez-vous ? –Là, on s’en va à Bordeaux. Trois cents ans d’architecture à Montréal Un de nos lecteurs a été frappé par le contraste architectural entre deux édifices du centre-ville, par une belle journée ensoleillée, que voici. On a donc hâte d’y retourner librement, sans masques ni désinfectant à toutes les cinq minutes…/GRACIEUSETÉ/JOSÉ IGNIACO GUTIERREZ Trudeau le trouillard S’il avait voulu, Justin Trudeau aurait pu prévenir l’incarcération des deux Michael (Kovrig et Spavor) et la tenue de leur procès en Chine. Comment ? En menaçant celle-ci d’interdire le déploiement de sa 5G en sol canadien si elle persistait, tout simplement. Mais il n’a rien fait, condamnant par ce même deux boucs émissaires canadiens à endurer des geôles infectes pendant quelque 835 longs jours et à subir des procès qui ont mis environ deux ans à se préparer et environ deux heures à se boucler. De son côté, Meng Wanzhou, une dirigeante de l’entreprise de télécommunications chinoise Huawei, à la solde de l’État chinois, qui aspire à couvrir le monde Faites-nous découvrir votre Montréal ! Photographes, à vos appareils ! Courez la chance de voir votre cliché publié dans les pages Opinions de votre journal favori... Faites-nous parvenir vos photos de la ville à opinions@journalmetro.com. MÉTRO Durant notre entrevue Zoom, Eugene me regarde d’un air catastrophé, celui d’un gars qui essaie encore de comprendre ce qui vient de se produire. –Vous vous foutez de ma gueule ? La réponse ? Non. Parce qu’une détention de huit heures au poste de police ne pouvait, apparemment, suffire, la prison de Bordeaux, maintenant. Un bon 12 heures. Au petit burger les grands moyens, faut croire… On l’accusera incessamment de vol qualifié, fondé sur le témoignage des deux employés. Un gros, sinon énorme, hic : ces mêmes témoignages souffrent d’une contradiction majeure. L’un dit qu’il a sauté au-dessus le comptoir pour piquer le contenu de la caisse, l’autre affirme plutôt qu’il a pris TRIBUNE LIBRE le temps de le contourner. Autre chose : l’accusé n’a pas un rond en poche lors de son arrestation. Enfin, quant à l’arme nécessaire à la commission d’un vol qualifié, on la cherche encore. Au propre comme au figuré. Un flash, par contre, heureusement : demander à la Couronne de fournir la preuve par caméra de l’altercation. Celle-ci demande au proprio du A&W les enregistrements en question. Neuf mois d’attente. Neuf mois où, ce Ghanéen d’origine devenu Québécois depuis bientôt 30 ans, diplômé comme machiniste du Centre de formation professionnelle de Rosemont, sans casier judiciaire, fidèle employé et citoyen-fantôme, stresse sa vie. Parce qu’il affronte une justice absurde. Celle où le fait d’exiger sa juste part de frites lui aura fait passer du temps en taule. Celle où le mensonge de deux commis pourrait l’amener à en faire davantage. de sa sombre toile 5G, attend le dénouement de son différend avec le gouvernement canadien en se la coulant douce dans sa luxueuse propriété de Colombie-Britannique, bracelet électronique à la cheville. SYLVIO LE BLANC, MONTRÉAL Journée mondiale de la tuberculose Ce 24 mars, on marquera la Journée mondiale de la tuberculose, une maladie infectieuse qui fait à peu près autant de victimes chaque année que la COVID en 2020. La différence est que la tuberculose L’absurde comporte toutefois, elle aussi, certaines limites : faute du proprio de pouvoir transmettre les bandes-vidéos, la Couronne abandonne, neuf mois plus tard, les accusations. Durant notre entrevue Zoom, Eugene me regarde d’un air catastrophé, celui d’un gars qui essaie encore de comprendre ce qui vient de se produire. Son avocat, M e Yeboah, est plus incisif. –Le délai de prescription pour poursuivre le SPVM est échu, mais pas celui afférent au resto et ses employés. M’en occupe personnellement. Et il a l’air sérieux, les amis… Morale de l’histoire ? Dans une société où un racisme systémique fait insidieusement rage, prière de ne jamais s’obstiner pour une vulgaire poignée de patates frites. À moins, on l’imagine, d’être Blanc. affecte peu, depuis plusieurs décennies, les pays développés. Par contre, un peu comme la COVID, la tuberculose a ses variants, appelés tuberculose pharmaco-résistante. Et le Canada n’est pas à l’abri de ces variants. Le Canada a financé depuis ses débuts TB-REACH, le mécanisme international qui promeut la détection de la tuberculose à travers le monde. L’engagement du Canada avec TB-REACH vient de prendre fin, mais l’histoire récente montre clairement que de baisser la garde devant les maladies infectieuses est une mauvaise stratégie. Espérons que notre gouvernement utilisera l’occasion de la Journée mondiale de la tuberculose pour renouveler son engagement avec TB-REACH, et contribuer ainsi à protéger tous les citoyens au Canada comme ailleurs. 6 JEAN-FRANCOIS TARDIF, GATINEAU Écrivez-nous ! opinions@journalmetro.com Volume : 21 Numéro : 7 À Montréal, Métro est publié par Métro Média, 101, boul. Marcel-Laurin, Montréal H4N 2M3 Tél. : 514 286-1066 Imprimé par : Transcontinental Transmag, 10807, rue Mirabeau, Anjou, Québec, H1J 1T7 Distribué par Metropolitan Media Services/Directrice de la distribution : Danielle Tessier Directeur principal des ventes : Patrick Marsan Contrôleur : François Dallaire Directeur de l’information : Olivier Robichaud Chef de pupitre : Carole Côté Vous avez une opinion à nous faire parvenir ? opinions @journalmetro.com Vous voulez annoncer dans nos pages ? publicite@journalmetro.com Vous avez une nouvelle à nous faire parvenir ? info@journalmetro.com. 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