10 CULTURE JEUDI 18/11/2021 metrotime.be ‘JULIE EN DOUZE CHAPITRES’ : RENATE REINSVE RÉINVENTE LA COMÉDIE ROMANTIQUE « Notre génération fait face à un paradoxe de choix » A star is born ! Lauréate du prix d’interprétation à Cannes alors qu’elle envisageait de lâcher le métier, la Norvégienne Renate Reinsve est venue présenter’Julie en douze chapitres’au dernier festival de Gand. Un film coup de cœur rendant ses lettres de noblesse à un genre souvent sous-estimé : la comédie romantique ! Comment Joachim Trier vous a-t-il repérée pour le rôle de Julie, cette jeune femme incapable d’arrêter ses choix sereinement ? Renate Reinsve : « Il a écrit le rôle pour moi ! Je disais une petite réplique dans son film’Oslo, 31 août’, et il m’a dit que j’étais faite pour tenir un rôle principal. Quand il a vu les années passer sans que ça n’arrive, il a sorti son clavier. Il avait remarqué que chacune de nos conversations terminait en questionnements existentiels, comme ce qu’est l’amour, ou pourquoi les mêmes schémas REVIEW JULIE EN 12 CHAPITRES Et si on prenait la comédie romantique au sérieux ? Alors que le genre s’enfonce avec Netflix dans un sillon de plus en plus mielleux, le Norvégien Joachim Trier corrige le tir, et nous sert une ambitieuse fantaisie sur l’amour au temps des Millennials. Julie et ses douze chroniques se trouvent ainsi à (l’étonnante) croisée des chemins entre l’humour intello de Woody Allen et le montage pop de ‘How I Met Your Mother’. Sur papier, il s’agit d’un triangle amoureux, mais la formule est transcendée par la mise en scène ludique (bonne chance pour choisir votre scène préférée parmi les pépites), par un propos actuel osant titiller nos boomers, et une actrice crevant l’écran avec son humour et sa vulnérabilité. Choisir, c’est renoncer… mais ne passez pas à côté de Julie, vous le regretteriez ! (si) nous attirent dans les mêmes galères, encore et encore. Et grâce au théâtre, il savait que je passais facilement du drame à la comédie. » Vous avez réagi comment ? « J’étais très nerveuse mais j’ai directement senti une connexion avec le rôle. Maintenant que le film a été montré, je réalise que je ne suis vraiment pas la seule. Tout le monde vient vers moi pour me dire qu’ils se sont vus sur le grand écran grâce à Julie. » D’où vient cet écho que Julie nous renvoie si ●●●●○ Ph. D.R. THE POWER OF THE DOG Le nouveau film de Jane Campion (‘La Leçon de Piano’, ‘Top of The Lake’) nous emmène au siècle dernier, chez les cow-boys du Montana (USA). George (Jesse Plemons) et Phil (Benedict Cumberbatch) sont frères, mais ils ne se ressemblent pas. À la blondeur timide et polie du premier s’opposent l’âpreté et la brutalité du second. Quand John épouse Rose (Kirsten Dunst) et l’installe avec son fils dans la ferme familiale, Phil ne cache pas son mépris envers les nouveaux venus. Or derrière sa cruauté, Phil cache un secret… Puissant et subtil dans sa mise en scène, et porté par des performances soignées, ce western postmoderne questionne habilement les aléas toxiques de la masculinité, le tout sur fond de superbes paysages sauvages. Quant au chien du titre, il est caché entre les montagnes : saurez-vous le trouver ? (em) facilement ? « Je pense qu’elle est bien ancrée dans l’époque actuelle, et qu’elle met en évidence la confusion que notre génération peut ressentir face à ●●●●○ MOVIES LES BODINS EN THAILANDE Où partiriez-vous pour vous retaper après une dépression ? Chez les Bodin’s, c’est Christian le grand dadais qui en a besoin, et Maria la matriarche qui choisit la destination ! Direction l’Asie et ses plages de rêve, sans oublier Bangkok et ses clubs corrompus. Le choc culturel s’avère vite énorme pour les deux fermiers, et bien pire encore pour les Thaïlandais croisant leur route. Le duo comique le plus populaire (mais bizarrement pas si célèbre) de France revient pour un troisième film, et cette fois-ci ils ont misé gros ! Fini les scènes tournées avec des bouts de ficelle, on s’octroie les services de Frédéric Forestier (‘Le Boulet’) pour assumer le virage vers la comédie d’aventure. Un choix payant, occultant les vannes potaches pour le public non-averti. (si) ●●○○○ a Ph. Oslo Pictures Ph. Netflix Ph. D.R. Ph. Cinéart au paradoxe des choix. C’est un concept économique, mais je trouve qu’il marche bien pour nos états d’âme. Nos ancêtres devaient choisir leurs carrières ou leurs familles très tôt, alors que nous pouvons changer de métier ou d’amant quand on veut. C’est très bien, mais ça implique un choc avec la culture qui nous précède. Et avec le capitalisme de nos sociétés, qui réduit nos échanges à de simples interactions de pouvoir. Il suffit de regarder Instagram, c’est un marché. » Les Millenials ont-ils trop de liberté ? « Non, mais cette abondance de choix peut nous agiter, nous rendre un peu nerveux… Le film parle du besoin d’accepter les moments merdiques de nos vies pour ce qu’ils sont, sans trop les intellectualiser, et en essayant même de les célébrer. » Stanislas Ide HAUTE COUTURE Jade, 20 ans est banlieusarde, rusée et paumée. Esther, bientôt retraitée, est bourgeoise, hautaine, et esseulée. L’une vit de petits délits, l’autre est cheffe couturière chez Dior. Au détour d’un vol de sac à main dans le métro parisien, leurs chemins vont se lier, la seconde offrant à la première une place de stagiaire dans son atelier. Entre ourlets, aiguilles, engueulades et tendresse, chacune va apporter à l’autre quelque chose qui lui manquait. La romancière et cinéaste Sylvie Ohayon réunit Nathalie Baye et Lyna Khoudri (‘The French Dispatch’), entourées de seconds rôles bien choisis, pour parler ascension sociale et famille choisie. Le casting pétille et l’esthétique est soignée, mais le scénario touche-à-tout n’évite pas certains clichés des deux côtés. (em) ●●●○○ |