8 Ei CULTURE MARDI 2/3/2021 I metrotime.be NICOLAS KERAMIDAS SE LIVRE « À COEUR OUVERT » « Il y a une similitude entre être confiné et être hospitalisé » En 1973, Nicolas Keramidas a été l'un des premiers bébés en France à être opéré à coeur ouvert. Quarante-trois ans plus tard, il a dû subir une nouvelle opération. Dans « À coeur ouvert », il raconte son histoire. C'est une grande première pour vous. Vous signez votre premier album autobiographique mais aussi votre premier album à la fois en tant qu'auteur et dessinateur. Comment avez-vous vécu cela ? « C'était tout le défi. Au début, j'ai même failli en faire un roman car je me demandais si j'allais réussir à tout gérer tout seul. Je savais que j'allais partir sur roman graphique, sur un gros pavé, et que ça n'allait pas être une BD de 46 pages. Le projet n'a fait qu'évoluer sans arrêt, mais toujours pour le bien du projet. Ce que j'aime bien, c'est que pour la première fois après 18 albums, je peux tout assumer de A à Z. Ce côté `auteur complet'que je n'avais jamais eu est vraiment plaisant. Je suis content que ça arrive sur un projet comme celui-ci car c'est moi et mon histoire. » Dans l'album, vous racontez que le projet est né en juin 2016 quand vous avez appris que vous alliez devoir subir une nouvelle opération à coeur ouvert, 43 ans après la première. « En janvier 2016, il y a eu l'incident sur un terrain de foot. Je n'avais pas prévu d'écrire un bouquin à ce moment-là. Ensuite, j'ai commencé à faire un tas d'examens mais on n'était pas encore sûrs de m'opérer à coeur ouvert. Tous ces examens avaient pour but de voir s'il n'y avait pas une solution alternative et beaucoup plus light. Jusque-là, je n'avais donc pas pris de notes. Mais quand j'ai appris que ça allait être à coeur ouvert, j'ai décidé tout de suite de tout noter. Je ne savais pas encore que j'allais en faire un bouquin mais c'était REVIEW une phase que je n'avais pas envie d'oublier. » Est-ce que l'écriture vous a aidé à traverser cette épreuve ? « Effectivement, il y a un côté thérapeutique là-dedans. Il y a des gens qui intériorisent tout ça et moi j'avais besoin de coucher tout ça sur papier. Ça m'a fait un bien fou de noter non-stop tout ce qui se passait » Vous expliquez aussi que la « projection dans le temps » vous a beaucoup aidé. En quoi ça consiste ? « Pour moi, c'est exactement ce qu'il se passe en ce moment avec le confinement. Il y a une similitude entre être confiné et être hospitalisé. On est mieux physiquement mais on a les mêmes contraintes et ce n'est pas très drôle. Avec ce bouquin, les gens vont découvrir le confinement, l'intubation. Ce qui aide les gens à tenir, c'est de se dire que cet été, ils pourront peut-être aller à la mer et au restaurant. Quand j'étais à l'hôpital, je fantasmais de pouvoir sortir. Quand on m'a opéré, on m'a raconté qu'il fallait attendre trois mois pour que je sois à nouveau bien. Ce qui me faisait tenir, c'était de me projeter après ces trois mois. Quand j'étais sur mon lit, je me suis dit que j'allais aller à des concerts, que j'allais aller flasher des Invaders (Ndlr : les oeuvres de street art en mosaïque de l'artiste Invader) en France et partout dans le monde. Ça donne tout simplement un but. » Votre récit va forcément toucher, voire inspirer, des personnes qui ont vécu le même type d'opération. UN DEUXIÈME ACTE PLUS EXPLOSIF QUE JAMAIS En 2018, « Il faut flinguer Ramirez » de Nicolas Petrimaux avait fait grand bruit. Après un peu plus de deux ans d'attente, les fans sont enfin servis avec la sortie, fin 2020, de l'acte 2. Si vous avez la mémoire courte ou si vous découvrez Ramirez, un code QR au début de l'album vous redirigera vers une vidéo qui vous rafraîchira la mémoire. Place ensuite à un second tome toujours aussi explosif, déjanté et captivant. Jacques Ramirez, réparateur d'aspirateurs, se retrouve pris dans une cavale folle et remplie de complications. Nicolas Petrimaux livre une nouvelle petite pépite, ultra-rythmée et bourrée d'humour et de bonnes idées. L'aventure est ainsi entrecoupée de fausses publicités, loin d'être anodines puisqu'elles ont toutes un lien avec l'album. Non seulement l'écriture et le scénario de Nicolas Petrimaux sont excellents, mais en plus « Il faut flinguer Ramirez » est un vrai régal pour les yeux. Bref, une tuerie ! (tw) « II faut flinguer Ramirez - Acte 2 », de Nicolas Petrimaux, éditions Glénat, 192 pages, 22,95 € Avez-vous déjà eu des retours ? « Beaucoup. C'est assez déstabilisant et j'avoue que je ne l'avais pas spécialement vu venir. J'ai reçu beaucoup de mails et de messages. Mais je ne peux pas et je ne veux pas être le porte-parole de tous les opérés du coeur car je me rends compte qu'on n'a pas tous le même ressenti. Je vois qu'il y a des gens que l'opération a traumatisés, bouleversés et qu'ils ont très mal vécu tout ça. En fait, moi je ne l'ai pas mal vécu. C'est mon expérience et mon propre vécu. Ça fait vraiment bizarre de recevoir tout ça mais je crois que c'est normal. » D'un point de vue santé, comment vous sentez-vous aujourd'hui ? « Je me sens très bien. En fait, on m'a opéré pour l'avenir. C'était plus une opération d'anticipation qu'une opération d'urgence. C'est une opération qui a été planifiée et dont le résultat n'était pas pour demain mais pour le futur. Mais au final, les médecins ont constaté qu'il y avait des résultats dans le pré- EN QUELQUES LIGNES Ma. » ememi à CŒUR OUVERT MI Ph. Dupuis 2021 BD sent. Aujourd'hui, je peux même retourner sur un terrain de futsal, ce que je n'imaginais jamais après l'incident qui a déclenché l'opération. J'avais fait une croix dessus et c'est une grande victoire. ». Thomas Wallemacq Atteint d'une malformation cardiaque à la naissance, la tétralogie de Fallot, Nicolas Keramidas est devenu en 1973 l'un des premiers bébés en France à être opéré à coeur ouvert. 43 ans plus tard, lors d'un match de foot, son coeur s'emballe à nouveau et il apprend qu'il doit subir une nouvelle opération à coeur ouvert. L'auteur et dessinateur en profite alors pour plonger dans ses souvenirs. Il raconte ses souvenirs d'enfance mais aussi comment il a vécu son hospitalisation et sa deuxième opération. Un récit personnel, émouvant et poignant, mais également porteur d'espoir. « A coeur ouvert », de Nicolas Keramidas, éditions Dupuis, 208 pages, 17,5 € UN MANGA PROFONDÉMENT TOUCHANT On n'a pas vraiment l'habitude de vous parler de manga. On aurait pu vous parler du sixième tome de « 50 nuances de gras. L'elfe qui aimait trop les frites » mais nous avons préféré mettre en avant « Jizo », un étonnant manga franco-japonais signé Mato et Mr Tan. Cette histoire complète de 240 pages à l'impression soignée se lit dans le sens de lecture japonais. Elle plonge les lecteurs dans une histoire d'amitié entre deux garçons : Aki, un enfant perdu, et Jizo, un mystérieux personnage sorti de nulle part. Passionné par le Japon, le scénariste et romancier Antoine Dole, alias Mr Tan, s'est inspiré de ses voyages et de petites statuettes devant lesquelles les Japonais se recueillent pour livrer un récit profondément touchant. Si vous n'avez jamais tenu de manga entre les mains, celui-ci pourrait tout à fait être votre premier, tant il est accessible, marquant et puissant. (tw) « Jizo », de Mato et Mr Tan, éditions Glénat, 240 pages, 10,75 € |