72 Maze Novembre 2015 Cinéma Dix pour cent L’autodérision à la Française L Nous sommes en 2006, deux collègues de l’agence artistique Artmedia à Paris nourrissent ensemble l’idée d’une série sur le métier d’agent artistique, une série dont l’ambition serait de dévoiler l’envers du décor. L’idée ici n’est pas de découvrir qui est derrière la caméra, mais plutôt, qui est derrière l’acteur. Les deux agents à l’origine du concept sont Dominique Besnehard - qui quittera l’agence la même année - et Michel Feller. orsque l’idée se concrétise pour devenir un projet, c’est la chaîne Canal+ qui se propose à la diffusion et Nicolas Mercier, rendu célèbre par sa série « Clara Sheller » qui se chargera d’en écrire le scénario. Le projet aura pour nom : 10 avenue George V en référence à l’adresse même de l’agence Artmedia. Seulement voilà, la chaîne cryptée préfère diffuser une série à l’aspect plus cruel et sardonique que ce que Besnehard et Feller avaient imaginé « dramédie ». Le désaccord ne peut trouver d’issue car chacun semble défendre ardemment son idée jusqu’à faire obstacle à toute négociation. Le projet est alors abandonné. Pendant près de cinq ans, 10 avenue George V reste un scénario inexploité et inexploitable qui trouve sa place dans la réserve des studios Canal+. C’est en 2011 que la chaîne France 2 s’avoue charmée par le concept et décide de le prendre en main. L’équipe ne change qu’à moitié : Dominique Besnehard devient producteur attitré, Nicolas Mercier reprend sa place à l’écriture et c’est Cédric Klapish qui vient réaliser deux épisodes et se voit attribuer le rôle de directeur artistique. 10 avenue George V devient Dix pour cent en référence au pourcentage du salaire d’un acteur que touche son agent. Le 14 octobre 2015, le premier épisode de la série est diffusé sur France 2. Sous les yeux de 4 800 000 téléspectateurs s’impose le fruit d’une coopération nouvelle qui voit renaître de ses cendres un projet resté longtemps inanimé. Le principe est simple : tout tourne autour de l’agence ASK à Paris. Quatre agents et leurs assistants se démènent pour faire vivre l’établissement. Autour d’eux les grandes stars du cinéma français se succèdent au fil de l’histoire et c’est entre cruel réalisme et subtile dérision que se situe l’atmosphère des épisodes. En effet, si la série entretient un réalisme à toute épreuve avec certains aspects de la vie des stars (puisqu’il est mentionné la chirurgie esthétique, la drogue, etc.), elle n’en est pas moins une série à tendances caricaturales, à la limite même d’une vulgarisation qui s’assume, elle, à cent pour cent. Néanmoins, au lieu de tomber dans la lourdeur d’un format à sketches revu et ressassé, Dix pour cent mise sur une subtilité qui fait se côtoyer la comédie et le drame, relayant les rôles principaux de la série non pas aux stars mais bien à leurs agents. Ces agents, ce sont eux qui mettent en avant la réelle profondeur de chaque personnage, et autour de qui la trame de la série tourne réellement. Les stars ne sont que de passage et leur rôle est d’apporter ce brin d’autodérision qui témoigne du modernisme de la série. Ne pas s’y méprendre : en effet, si le terme d’autodérision ne relève pas vraiment du modernisme, elle |