10 Eye of Science/Phanie À la une les défis du cea juin 2011 Peau saine vue au microscope, avec et sans crème protectrice. » > d’idées, tous les types cellulaires de peau – mélanocytes, kératinocytes ou fibroblastes – montrent à peu près la même sensibilité. L’Institut Curie confirme l’apparition préférentielle de mutations précisément sur les sites de l’ADN contenant deux pyrimidines adjacentes, c’est-àdire là où se forment les dimères. Enfin, les dermatologues de l’hôpital de Grenoble recrutent 24 volontaires (12 de phototype 2 et autant de phototype 4), mesurent leur sensibilité individuelle aux érythèmes – le nom médical des « coups de soleil » –, et leur prélèvent quelques millimètres carrés de peau qu’ils irradient ensuite avec des UVA ou B. Résultat : pour chaque personne, les dégâts des UVA et B sont liés, ce qui confirme encore la similitude des mécanismes. De plus, l’ADN est plus sensible aux UVA dans les peaux claires que foncées. Au total, les UVA, directement absorbés par l’ADN des cellules de peau, provoquent les mêmes dégâts physicochimiques que les UVB, avec les mêmes conséquences en termes de mutations et, donc, logiquement, peuvent induire les mêmes types de cancers, dont le très dangereux mélanome. Tous les types de cellules sont sensibles, et le phototype de peau a la même influence que pour les UVB. « Même si les UVA se montrent cent à mille fois moins « efficaces » que les B pour induire des mutations, ils sont au moins vingt fois plus abondants dans le spectre solaire, donc mieux vaut ne pas négliger leurs effets. Il convient en particulier de repenser l’utilisation des lampes Tous les tubes d’écran solaire commercialisés portent aujourd’hui la mention de leur facteur de protection. Celui-ci est fixé par un test standardisé au niveau international, et déterminant la « dose érythémale minimale ». Il s’agit de la quantité d’UVB nécessaire pour SANTÉ Les dommages de l’ADN provoqués par les UVB et les UVA sont de même nature. et cabines de bronzage artificiel aux UVA », prévient Thierry Douki. Le projet Dimuva vient de s’achever, mais quelques points restent à éclaircir. Il faut en particulier comprendre pourquoi, alors que les dommages de l’ADN provoqués par les UV A et B sont de même nature, la cellule met plus longtemps à réparer les premiers. Vingt-quatre heures après une exposition aux UVB, il reste encore plus de la moitié des dimères induits. Les premières données suggèrent qu’il faut presque deux fois plus de temps pour réparer les dimères induits par les UVA. Un inconvénient qui peut, pour la recherche, devenir un avantage. Cette longévité permet en effet de mesurer « facilement » les dégâts dus tant aux UVB qu’aux UVA, et de les utiliser comme marqueurs de l’exposition générale aux UV. C’est en tout cas l’objet de la toute récente collaboration de l’équipe grenobloise avec les laboratoires Pierre- Fabre (lire ci-dessous), qui a pour objectif de créer un nouvel indice de protection pour écrans solaires. UN NOUVEL INDICE DE PROTECTION induire un « coup de soleil » sur une petite portion de peau, chez des volontaires protégés par le produit à tester. Un autre indice a plus récemment été créé pour prendre en compte les UVA. Il repose sur leur capacité à faire foncer la peau – c’est le « bronzage » artificiel des lampes UVA. Cependant, aucun de ces indices ne rend compte de la protection contre les mutations, donc contre les risques de cancer. Aucun des deux, non plus, ne peut s’appliquer à tous les types de peau. En collaboration avec Nathalie Castex- Rizzi, des laboratoires Pierre-Fabre, l’équipe de Thierry Douki a donc récemment développé un nouvel indice, basé sur le taux de dimères provoqués. Trois écrans solaires standards, plus un produit commercialisé, ont été testés avec la méthode mise au point à Grenoble (HPLC couplée à la spectrométrie de masse). Résultat : le taux de dimères dépend bien des caractéristiques de protection des écrans, et peut constituer un bon marqueur de leur capacité à diminuer les risques de mutation. Pour faciliter l’éventuelle adoption d’un tel indice par l’industrie cosmétique, les protagonistes ont choisi de ne pas le breveter. Reste tout de même à standardiser les protocoles de test. De plus, le prix de l’appareillage nécessaire pourrait constituer un frein. |