I 26 CARRIÈRES AU CŒUR DE L'EMPLOI (DR.) STRATÉGIE Ces recruteurs qui veulent protéger la planète Après un développement en dents de scie, le secteur des énergies renouvelables prend un nouveau départ. Les entreprises n’hésitent pas à former elle-mêmes leurs salariés. LE PARISIEN ÉCONOMIE I LUNDI 30 NOVEMBRE 2015 Bern TERREL Directeur associé chez Arthur Hunt Comment se porte l’emploi dans les énergies renouvelables ? Entre 2005 et le Grenelle de l’environnement en 2007, on a évoqué plusieurs centaines de milliers d’emplois potentiels. Des prévisions sans doute trop optimistes, car on n’a jamais atteint ce niveau. Les belles incitations fiscales se sont arrêtées il y a deux ans, certaines entités et startup ont même fermé, et actuellement, on est très en retard par rapport à des voisins européens comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou les pays scandinaves. Aujourd’hui cela reste une niche. Mais on observe quand même un vrai frémissement. Officiellement, le but reste d’atteindre en 2020 la production d’un quart de notre énergie grâce aux ressources renouvelables. On n’en est encore loin mais l’objectif est là. Quels sont les métiers porteurs ? Il y a deux secteurs porteurs : le bâtiment et l’énergie. On recrute notamment des ingénieurs études en énergies renouvelables et efficacité énergétique, et des ingénieurs thermiciens pour optimiser la consommation d’énergie et les intégrer milibris_before_rename L’AVIS DE... « Le bâtiment et l’énergie sont en pointe » dans le bâtiment. On trouvera là de belles opportunités pour les jeunes diplômés qui peuvent être facilement embauchés après un stage, par exemple, sans davantage d’expérience. Ces candidats peuvent faire de belles carrières et devenir manager, et suivre, à terme, des projets de bout en bout, de la conception à la mise en service. Mais on va aussi chercher des chefs de projet ou chargés d’affaires avec trois à cinq ans d’expérience, voire des experts avec dix ans d’expérience. Pour ces profils, les demandes augmentent et on observe des tensions. Quelles sont les formations appréciées ? Elles sont de plus en plus larges, aussi bien dans les écoles d’ingénieurs que dans les universités où l’offre devient intéressante. Le marché est moins discriminant pour les universitaires dans ce domaine-là que dans d’autres. A côté des écoles spécialisées reconnues (Supelec, Ensam, ENISE à Saint-Etienne, INSA de Rouen, polytech Orléans ou Nantes, Ense3 Grenoble), et des école généralistes (Supelec, Ensam), on note une forte montée en puissance des diplômes universitaires avec des Master en énergies nouvelles et renouvelables. A l’embauche, le décalage de rémunération peut être de 15% à 20% mais il se lisse assez vite au bout de trois à cinq ans. (PhotoPQR/Le Télégramme/Sylvain Rigo.) 10 840 emplois dans la filière. (fin 2013,source:Observ’ER) on aura bientôt du pain sur la planche. Beaucoup de travail, « Normalement, suivi de beaucoup d’embauches. » Fabien Kayser reste prudent mais optimiste. Le président d’Ostwind, une entreprise spécialisée dans l’exploitation de l’énergie éolienne, attend les effets de la nouvelle loi sur la transition énergétique votée en août. « On prévoit en général entre sixmoisetunanpourquel’administration s’adapte. On a déjà enregistré une petite croissance cette année. Ensuite, si les déclarations du ministère sont suivies d’effet, on vapasserde10000MWinstallés actuellementà25voire30000en 2023. » « Disons qu’il y a eu comme un vrai-fauxdémarrageilyaunedizaine d’années, observe Alexis Eychenne, consultant au cabinet Hudson. Le « green » était la mode et on a beaucoup embauché dans l’éolien et le photovoltaïque. Mais le marché n’était pas suffisamment préparé ni réceptif. » Alexis Eychenne affirme toutefois que les temps changent. « Aujourd’hui, l’idée est bien ancrée dans l’opinionquec’estunenjeupourla planète et que cette évolution est inéluctable. » Pour autant, les nouveaux profils recrutés ne sont pas toujours forcément ceux que l’on imagine. « Cette révolution va s’appuyer sur une nouvelle façon de consommer l’énergie, témoigne Gilles Roland, fondateur d’Active’Invest, un groupe industriel qui intervient justement dans des projets verts. On va valoriser le ventetlesoleilparexemple.Mais encore faut-il fabriquer ces installationsetlesmettreenplace. » Cet entrepreneur évoque davantage de besoins dans des métiers traditionnels que pour des profils d’ingénieurs ultra-spécialisés. « Pour ma part, j’ai aussi besoin de maçons, de couvreurs ou de soudeurs, qui sont par ailleurs des profils en tensiondanslebâtiment. » Pour faciliter son développement, Ostwind, basée à Amiens (Somme), a signé un partenariat avec la région Picardie pour promouvoir de nouveaux cursus de formation de techniciens en maintenance et exploitation des éoliennes. « Onprendlesdevants. Jusqu’ici, on avait plutôt capté des profils déjà opérationnels dans le milieu de la construction mais nous prenons de plus en plus d’initiatives pour orienter de jeunes diplômés vers nos nouveaux métiers. » « A ce jour, je n’ai pas trouvé de meilleure solution que de choisir des profils motivés et de les former ensuite, ajoute Gilles Roland. Les ingénieurs et techniciens disposent en général d’un socle de formation important, auquel on peut ajouter un complément de formation en fonction de notre activité. Toutes les entreprises du secteur ont des efforts importants à fournir. » « Beaucoup d’entreprises, dans de nombreux secteurs, investissent dans la recherche-développement », résume Alexis Eychenne. Y compris certains acteurs inattendus. « Contre toute attente, le secteur de l’automobile, avec la voiture intelligente, hybride et électrique, prend aussi le relais. Plus qu’un effet de mode, c’est devenu un vrai enjeu économique. » Dans l’ensemble, ce recruteur recherche surtout des profils d’ingénieurs études ou process spécialisés, dans les systèmes thermodynamiques et le traitement du gaz par exemple. « La meilleure solution : choisir des profils motivés et les former ànosnouveauxmétiers » « Globalement, on enregistre une grosse demande sur des profils de chefs de projet recherche-développement capables de suivre des projets avec une démarche d’innovation forte. Ce sont vraiment des emplois d’avenir. » CÉLINE CHAUDEAU EN SAVOIR PLUS À LIRE « Changeons d’énergies : Transition, mode d’emploi de l’Association Negawatt », éditions Actes Sud, 2013, 112 pages, 10 € . « Les métiers de l’énergie », collectif, éditions Onisep, 120 pages, 2013, 12 € . À CONSULTER Le dernier baromètre Observ’ER : www.energies-renouvelables.org La loi sur la transition énergétique pour la croissance verte : www.developpementdurable.gouv.fr |