théâtre 34 la terrasse 281 novembre 2019 CRÉATION La Vie de Galilée De Bertolt Brecht Mise en scène Claudia Stavisky 15 nov.– 1er déc. 2019 EN TOURNÉE anthea, Théâtre d’Antibes 17–18 déc. 2019 La Comédie de Saint-Étienne, Centre dramatique national 8–10 janv. 2020 Maison de la Culture de Nevers-Agglomération 17 janv. 2020 Le Quai, Centre dramatique national Angers-Pays de la Loire 23–24 janv. 2020 THEATREDESCELESTINS.COM CORRIDA - Illustration : Hélène Builly - Licences : 1119751/1119752/1119753 critique Le roi se meurt suisse/TKM- Théâtre Kléber-Méleau, Lausanne/d’Eugène Ionesco/MES Cédric Dorier Cédric Dorier livre une mise en scène tonique et ludique de la pièce de Ionesco, en restituant sa portée métaphysique, métaphorique et même prophétique. On dit qu’avec le soleil, seule la mort ne se regarde pas en face. C’est pourtant ce que fait Ionesco en 1962 au sortir d’une grave maladie, exorcisant son angoisse – en deux semaines d’écriture seulement – dans une pièce qui tient autant de farce que de la métaphysique. Dès le début, les cartes sont abattues : le roi va mourir. Et après tout n’a-t-il pas assez vécu ce vieux monarque égoïste et égocentré, tyrannique et jouisseur, qui pendant quatre cents ans de règne, a davantage pensé à lui et au courtterme plutôt qu’à son royaume, désormais dans un état de délabrement avancé ? Mais est-on jamais prêt à envisager concrètement l’idée de sa propre mort ? « Il n’avait qu’à y penser plus tôt », assène cruellement la reine Marguerite, plutôt que de remettre chaque jour au lendemain son apprivoisement de la mort. Car le lendemain finit par être l’aujourd’hui, contraignant le roi à passer en moins de deux heures par tous les états d’esprit : déni, révolte, découragement, régression, nostalgie, résignation. Si la pièce de Ionesco paraît atemporelle, c’est bien sûr qu’elle nous renvoie à notre propre et universelle finitude. Une éphéméréité de la condition humaine que Cédric Dorier symbolise par un ingénieux décor circulaire pouvant représenter à la fois le royaume, la couronne, une planète, la roue du temps ou pourquoi pas une machine infernale. Mais en mêlant dans le même temps, comme le fait le texte, concrétude des situations et portée métaphysique, comique et tragique, le metteur en scène réussit à souligner particulièrement deux autres aspects de la pièce : celle de la métaphore de la représentation théâtrale, avec une fin qui envoie ostensiblement valser le quatrième mur ; et surtout celle, quasi prophétique chez Le Jour où Siméon sortira Théâtre-Studio/DE Kani Kabwé Ogney/MES Jean Felhyt Kimbirima Georgette Kouatila, Adolphine Milandou, Alphonsine Moundélé et Raissa Nzitoukoulou mettent leur charisme et leur talent au service de l’ode à l’espoir et à la résistance écrite par Kani Kabwé Ogney et mise en scène par Jean Felhyt Kimbirima. Comme Winnie réclamant Mandela, comme les mères de la place de Mai, comme Lucie exigeant la libération de Raymond Aubrac, les quatre femmes qui attendent la sortie de Siméon ont un courage, un bagout et un toupet extraordinaires. Loin des figures du stabat mater dolorosa, elles ne sont ni dolentes ni exténuées par le désespoir, mais sont droites et debout face à l’adversité et à l’injustice. Siméon est la figure emblématique de l’opposition au régime. Un décret d’amnistie vient d’être publié et on se retrouve devant la prison pour accueillir les prisonniers enfin libérés. La mère et l’épouse de Siméon sont là, bientôt rejointes par sa tante et une voisine. La presse est dépêchée sur place, le monde entier retient son souffle, mais Siméon tarde… Quatre Antigone pour un absent Siméon est comme l’astre absent autour duquel gravitent ces quatre planètes. Il est celui dont on parle, que l’on évoque avec émotion et tendresse et dont le souvenir alimente le brasier de la résistance. La pièce G. Kouatila, A. Milandou, A. Moundélé et R. Nzitoukoulou dans Le Jour où Siméon sortira. « est également un hommage, aussi et avant tout, à la force des femmes africaines face aux violences politiques et leurs conséquences sur les familles, la communauté et le pays ». Son auteur, fin connaisseur de l’histoire de la violence politique en Afrique, réussit à mêler le particulier et l’universel. Les quatre femmes dont il imagine le dialogue sont comme Antigone : l’âge et la culture importent peu lorsqu’il s’agit de se dresser contre l’iniquité du pouvoir qui croit que pour tuer la liberté, il suffit de supprimer ceux qui la revendiquent… Les femmes qui l’attendent attestent par leur présence, leur patience et leur force, que Siméon, libre ou enfermé, mort ou vif, retrouvé ou perdu, est un cri inextinguible que rien ni personne ne peut faire taire, d’autant que le théâtre le répète à son tour au monde… Catherine Robert Théâtre-Studio, 16 rue Marcelin-Berthelot, 94140 Alfortville. Du 8 au 23 novembre 2019. Du mercredi au samedi à 20h30. Tél. 01 43 76 86 56. Kinzénguelé |