4/N°153/décEMBRE 2007/la terrasse théâtre critiques du 30 novembre au 28 décembre 2007 PORT DU CASQUE OBLIGATOIRE DE KLARA VIDIC AVEC JULIE BROCHEN*, DENIS CACHEUX, EDDY CHIGNARA, PHILIPPE FRÉCON, JEAN-CLAUDE LEGUAY, FANY MARY, STANISLAS STANIC, KLARA VIDIC* *EN ALTERNANCE MISE EN SCÈNE FRED CACHEUX, EN COLLABORATION AVEC DAVID MAISSE SCÉNOGRAPHIE ET LUMIÈRES XAVIER HOLLEBECQ, SON SAMUEL MAZZOTTI, ASSISTANTES CLÉMENCE BORDIER ET EMMANUELLE DAHAN 01 43 74 99 61 production Compagnie FC, coproduction Théâtre de Chelles, en collaboration avec le Théâtre de l’Aquarium, avec le soutien de l’Adami, de la Direction régionale des affaires culturelles d’Ile-de- France – Ministère de la culture et de la communication et de la Ville de Paris. Cette œuvre a bénéficié de l’aide à la production et à la diffusion du fonds SACD. www.theatredelaquarium.com Route du Champ de Manœuvre | 75012 Paris Le Théâtre de l’Aquarium est subventionné par le Ministère de la Culture et de la Communication, Direction de la Musique et de la Danse, du Théâtre et des Spectacles, par la Ville de Paris et le Conseil Régional d’Ile de France. N°licences 1002895 -1002896 | N°Siret 784 130 486 00037 | Code APE 923A Casque-Pub-01.indd 1 14/11/07 20:48:11 critique ¶ Terrien Alors que les scènes de Chaillot voient brûler, pour la dernière saison, les feux de l’art dramatique, Yannick Jaulin transcende le genre du conte pour engendrer un voyage théâtral éminemment personnel. Entre pudeur, gravité, poésie et sens du pittoresque. « Ça, c’est votre espace pour un moment, votre territoire », lance Yannick Jaulin au public, désignant le siège sur lequel chacun est assis, la salle que les spectateurs réunis partageront le temps d’une représentation. Une représentation à une voix, un corps, ceux d’un artiste particulièrement touchant, un fils de paysans qui s’est inventé un destin de conteur, un « terrien » qui s’est mué en poète, qui a réussi à conquérir un territoire pour lui hautement improbable : celui de la scène. Après J’ai pas fermé l’œil et Menteur, Yannick Jaulin donne suite aux chroniques de vie qui composaient ses précédents spectacles à Un monologue tendre et facétieux questionnant la notion des territoires. De façon contenue, allusive, extrêmement délicate. Comme sur la courbe zigzagante d’une escapade initiatique, il fouille ainsi les béances intimes qui ont pu l’amener à vouloir trouver une réponse toute faite à la question du monde. A la question de l’homme. A la question de la place dévolue à chacun. Terrien n’apporte évidemment aucune explication à ces interrogations. Donnant corps à une représentation à la fois simple et recherchée (la mise en scène de Frédéric Faye utilise la vidéo de façon réellement pertinente), faisant se côtoyer drôlerie, sensibilité, délires hallucinatoires, brefs éclats de gravité, Yannick Jautravers une forme assez atypique d’autofiction théâtrale. Réinvestissant ses origines vendéennes, son enfance, ses rêves, ses doubles, ses fantômes…, il questionne les notions de cheminement, d’apprentissage et de territoires (tant intérieurs que cadastraux), interroge la dualité ontologique qui, depuis Caïn et Abel, écartèle l’homme entre sédentarité et nomadisme, refuge du chez-soi et appel de l’ailleurs. Un jour, l’auteur-comédien a lui-même succombé à cet appel impérieux, en entrant dans les rangs de l’Ordre du Temple solaire. Les démons et merveilles d’une escapade initiatique Et c’est aussi cette expérience, dont il avoue ne pas s’être « sorti de manière catastrophique », que Yannick Jaulin souhaite sonder grâce à son spectacle. lin explore l’idée du morcellement et évite le poncif de la solennité dramatique. Car c’est un spectacle très joyeux qu’il nous invite à partager. Un spectacle joyeux et poétique qui veille à raconter des histoires pour que nous gardions les yeux grands ouverts, à raconter le monde pour qu’il ne disparaisse pas. Manuel Piolat Soleymat Terrien, de et avec Yannick Jaulin, mise en scène de Frédéric Faye. Du 8 novembre au 21 décembre 2007. Du mardi au samedi à 20h30, le dimanche à 15h00. Relâche les lundis, les 18 et 20 novembre, les 2, 4 et 16 décembre. Théâtre National de Chaillot, 1, place du Trocadéro, 75116 Paris. Réservations et renseignements au 01 53 65 30 00. Reprise à la Scène nationale de Saint-Quentin-en-Yvelines les 16 et 17 janvier 2008. Tél. 01 30 96 99 00. critique ¶ La Veuve, la couturière et la commère William Mesguich met en scène « la farce onirique et meurtrière » écrite par Charlotte Escamez qui joue à rire de la mort en lui inventant des servantes délurées, terrifiantes et castratrices. Elles sont trois, aussi vieilles que le ciel, la terre et la nuit, aussi cruelles que la nécessité ou la justice que les poètes anciens croyaient mères des Parques, et portent les attributs de leurs antiques modèles. Maria, Lola et Antonia, campées avec faconde par Agathe Alexis, Anne de Broca et Michèle Simonnet qui semblent bien s’amuser à jouer les mégères vipérines, vivent sur une île au milieu des flots et font leur miel des restes des trépassés. Hirsutes comme des gagneuses de la Cour des miracles, décrépites comme les façades des rues de La Havane, loqueteuses comme des harengères mal embouchées dont le temps a pétrifié la beauté, elles pestent et éructent contre le sort et leur condition qui les ont faites bignoles métaphysiques d’un palais maritime improbable. La veuve entretient son cimetière miniature et pleure sur les défunts, la couturière ravaude un manteau aux allures de linceul et la commère écoute dans son coquillage les dernières paroles des cadavres à venir. L’élégie scabreuse d’une hydre tricéphale Philosophique et loufoque, poétique et décadent, poissard jusqu’au sublime, le texte de Charlotte Escamez est un drôle de mélange, qui emprunte à Kantor, à la mythologie et à la psychanalyse les clefs de son déchiffrement. Le grotesque est assumé et soutenu par une mise en scène inventive qui joue des accessoires et des costumes pour soutenir la suggestion tout en sachant ménager de vrais moments de respiration quand perce la poésie sous les torrents d’un verbe allergique à la censure. Philippe Fenwick, travelo ricanant, se/pour recevoir la terrasse par internet, envoyez un mail à : la.terrasse@wanadoo.fr en objet : recevoir la terrasse/Photo : Nicolas Joubard |