14 Une assistante d’éducation et une infirmière de l’Éducation nationale ont été formées pour prévenir le risque suicidaire en lycée. Sentinelles : « Être attentifs pour pouvoir identifier les facteurs de risque suicidaire » Entretien avec Isabelle Haffner, assistante d’éducation (AED), Karine Guignard, infirmière scolaire, lycée polyvalent Xavier‐Marmier, Pontarlier. La Santé en action : Pourriez‐vous décrire la mission d’une sentinelle ? Isabelle Haffner : C’est d’abord une personne qui dispose d’une qualité d’écoute et d’une volonté d’entraide. Dans son quotidien de travail, son rôle est de repérer les élèves en souffrance, de manifester sa préoccupation pour cet état de mal‐être et de les orienter si besoin vers le personnel compétent qui pourra les accompagner. Le professionnel « sentinelle » doit être formé, soutenu et reconnu par sa communauté de travail. Il faut être attentif pour pouvoir identifier les facteurs de risque chez les élèves : tristesse, isolement, changement dans le comportement, manque d’appétit à la cantine, disputes, absentéisme, signes physiques (hématomes, scarifications...). Il est aussi nécessaire de savoir mettre l’élève en confiance, sans le juger, ni le culpabiliser pour qu’il se confie à vous. Il est également important de bien comprendre les limites de cette mission, c’est‐à‐dire ne pas chercher à résoudre le problème soi‐même et être en mesure de passer le relais. Karine Guignard : Ce que j’attends des assistants d’éducation (AED) « sentinelles » de notre établissement, c’est qu’ils soient en vigilance accrue, que le souci qu’ils ont des élèves leur permette d’identifier les facteurs de risque qui doivent alerter et qu’ils puissent ensuite en référer, sans perte de temps, aux personnes ressources : infirmière, conseiller principal d’éducation (CPE), proviseur. S. A. : Dans quel contexte jouez‐vous ce rôle de veille ? I. H. : Je suis assistante d’éducation à mi‐temps à l’internat des filles, qui accueille pendant la semaine environ 160 lycéennes, encadrées par six AED. L’internat, c’est un lieu de vie, rythmé par des temps – le repas, l’étude, le quartier libre –, où l’appel est fait trois fois avant le coucher à 21 h 45. Nous sommes au plus près des élèves. Le soir est un moment propice aux échanges et donc aux confidences. C’est peut‐être aussi pendant ces instants que certains peuvent ressentir davantage la séparation avec leur famille. K. G. : Pour les lycéens qui arrivent en seconde, l’internat est souvent une première expérience. Il leur faut à la fois du « cocooning 1 » et de la fermeté. Les élèves accueillis ont des profils très divers. L’éloignement géographique ne permet pas à certains de rentrer chez eux. Pour d’autres, l’internat est une alternative pour s’éloigner d’un milieu familial difficile. Quelle que soit la situation, il faut être attentif. Les assistants d’éducation « sentinelles » de jour sont confrontés à d’autres problématiques, mais ils s’avèrent tout aussi importants dans le repérage des signes de mal‐être. S. A. : Comment intervenez‐vous concrètement ? I. H. : Lorsque certains signes me laissent à penser qu’une ou un élève ne va pas bien ou se trouve en difficulté, j’essaie d’engager la discussion tout en respectant son intimité. Je l’invite à boire une tisane dans le petit salon afin de créer un climat DR VigilanS Hauts de France |