12 Le plan d’action déployé en France contre le suicide inclut la formation des professionnels : infirmiers, psychologues, médecins, sentinelles, travailleurs sociaux, etc. « Former pour mieux accompagner les personnes en souffrance psychique » Entretien avec Pierre Vandel, psychiatre au centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Besançon. La Santé en action : Dans quels organismes exercez‐vous des responsabilités ? Pierre Vandel : Je suis professeur de psychiatrie à la faculté de médecine de Besançon, université de Franche‐Comté et praticien hospitalier au centre hospitalier régional universitaire (CHRU), chef de service de la psychiatrie de l’adulte. Par ailleurs, j’exerce le rôle de coordonnateur de la fédération dédiée à la prise en charge psychiatrique du sujet âgé sur l’ensemble du territoire couvert par l’Association hospitalière de Bourgogne Franche‐Comté. Enfin, je suis formateur en prévention du suicide depuis 2001. Dans cette décennie, notre binôme de formateurs – psychiatre‐psychologue – a formé des professionnels à l’évaluation de la crise suicidaire. L’objectif était de proposer des outils d’évaluation de la crise suicidaire et de sensibiliser un certain nombre de métiers de terrain, non seulement les professionnels de santé, mais aussi d’autres professionnels tels que les policiers, le personnel de l’Éducation nationale, les aides à domicile qui sont au contact des personnes âgées, etc. S. A. : Comment a évolué ce dispositif de formation en prévention du suicide ? P.V. : En 2018, la nouvelle stratégie de prévention a actualisé le modèle qui avait été déployé dans les années 2000. Elle s’articule désormais autour de trois niveaux : la sentinelle, l’évaluateur, l’intervenant de crise. La sentinelle a une fonction de repérage et d’orientation. Il s’agit donc d’investir des personnes volontaires dans leurs fonctions et de les sensibiliser. Ces sentinelles – dans leur milieu professionnel, dans une association sportive ou un club du troisième âge par exemple – vont être attentives aux signes d’une crise suicidaire et vont pouvoir alerter. Ensuite, l’évaluateur doit être en mesure d’évaluer le potentiel suicidaire et de proposer des recours ; les évaluateurs sont des professionnels de santé au sens large, spécifiquement formés à ce rôle. Enfin, l’intervenant de crise précise le type de crise et propose les premiers gestes d’accompagnement. Il s’agit en général des professionnels en santé mentale. Par ailleurs, en 2018, dans le cadre de notre binôme psychiatre‐psychologue formateur en prévention du suicide, ma collègue et moi‐même avons actualisé nos compétences ; nous intégrons cette nouvelle approche dans la formation des anciens formateurs régionaux et des nouveaux, ce qui est notre mission principale. En quatre jours, nous devons transmettre à ces binômes – psychologue‐infirmier, médecin‐clinicien – la méthodologie et les outils permettant de former les personnes‐ressources des trois niveaux évoqués : sentinelle, évaluateur, intervenant de crise. Enfin, j’anime aussi des sessions de formation en prévention du suicide directement auprès de certains publics concernés, professionnels de santé dans les hôpitaux ou les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), ainsi qu’auprès des personnels de l’Éducation L’ESSENTIEL ÇÇ La formation des professionnels et des autres personnes‐ressources à la prévention du suicide est l’un des cinq axes prioritaires du plan national mis en œuvre pour prévenir les conduites suicidaires. L’objectif est de former les intervenants – sentinelles, évaluateurs des situations, intervenants de crise – au plus près du terrain. nationale – enseignants, conseiller principal d’éducation (CPE), assistant d’éducation, etc. – dans le cadre d’un programme de déploiement de sentinelles, organisé par l’académie de Besançon. S. A. : Comment s’organise la collaboration entre les formateurs en prévention du suicide, l’hôpital et l’agence régionale de santé ? P.V. : Une charte a été signée entre le CHRU de Besançon et la Direction générale de la santé, permettant à un formateur de l’établissement de consacrer dix journées par an à la formation sur son temps de travail, et ce afin de déployer sur la région la nouvelle stratégie de prévention. Une fois le besoin identifié, nous nous tournons vers l’agence régionale de santé (ARS) qui doit mettre en place la logistique et débloquer un budget de financement. Cette organisation est complexe, car elle implique deux directions : la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) dont relève la formation des formateurs et la Direction générale de la santé, dont relève la formation des professionnels de santé. Par ailleurs, il faut identifier |