526 REVUE DES DEUX MONDES. Leurs innombrables carnets de route, dont il n'est pas un qui n'ait du prix, qui forment une bibliothèque, une littérature, et qui sont mieux que de la littérature, au-dessus de toute littérature... Il serait long d'en dresser une liste complète. Je laisse de côté, non sans regret, ceux qui n'ont été rédigés ou mis au point et publiés que depuis la guerre, quoique, parmi ceux-là, j'en connaisse de bien remarquables, notamment celui qui est inséré dans le Prix de l'homme, roman d'un lieutenant blessé devant Verdun qui signe Jean de Granvilliers, et ces Croix de bois de M. Roland Dorgelès que tous les anciens combattants tiennent en si haute estime. Je ne retiens, puisqu'il faut se borner, que les carnets qui ont paru au cours de la guerre, qui venaient d'être écrits sous les obus, en pleine fournaise, qui étaient de la réalité vivante et saignante. En campagne, Dans l'attente par Marcel Dupont, officier de cavalerie légère ; Carnet de route d'un officier d'alpins, par Georges Bertrand ; Carnet de route d'un officier de dragons, par Adrien Bertrand, frère du précédent ; Ce qu'a vu un officier de chasseurs à pied, l'Infanterie héroïque et douloureuse, Face aux Bulgares, par le capitaine Henri Libermann ; fila pièce, et le Tube 1233, par le chef de pièce Paul Lintier ; Lettres d'un officier de chasseurs alpins, par le capitaine Belmont ; Morhange et les marsouins en Lorraine, par le lieutenant Christian Frogé ; Mon régiment, par l'abbé et sous-lieutenant Paul Dubrulle ; Lettres de guerre, par Pierre-Maurice Masson ; la Vie des martyrs, par le Dr Georges Duhamel ; Notes d'une infirmière, par Mme Eydoux- Dém ian ; Carnets d'une infirmière, par Mme Noëlle Roger. Je ne puis pas ne pas mentionner encore les carnets des sous-lieutenants, lieutenants ou capitaines Delvert, Ilassler, Tuffrau, Henry Malherbe, Levis Mirepoix, Henry d'Estre, Christian Mallet, Maurice Genevois, et de ce Jacques Péricard qui criait : « Debout, les morts ! » dans la tranchée du Bois-brûlé... En prononçant tant de noms que nos enfants devront un jour connaître et révérer, je me reproche d'en omettre plus d'un qui ne serait pas moins digne d'être rappelé. Il en est du moins, parmi ceux que je mentionne, sur lesquels je voudrais m'arrêter un peu plus, ou plutôt devant qui je voudrais m'incliner, parce que ce sont ceux des morts. Mort à vingt-neuf ans, Adrien Bertrand, mort le 18 novembre 1911 à l'hôpital de Grasse. 11 était journaliste et poète, et se |