628 TEVUE DES DEUX MONDES. et ce fut une surprise et un désespoir, quand le Comte de Chambord le tira de sa poche pour le faire flotter à nos yeux. C'est ce que je raconterai plus au long, si mon récit va jusque-là. Au reste, si j'en crois ce que m'a dit depuis M. de Falloux, ce fut dans ces premiers jours de l'Empire que changea assez brusquement l'humeur du Comte de Chambord. Jusque-là, ceux qui l'approchaient, trouvaient un jeune homme modeste, peu sùr de lui-même, et écoutant volontiers les conseils de ses amis du Parlement. Les idées libérales et constitutionnelles à la mode dans la jeune école légitimiste pendant la monarchie de Juillet, et dont Chateaubriand lui avait porté à Londres l'expression et l'hommage, étaient bien accueillies, et cette tendance contrariait même assez fortement les vieux royalistes de droit divin. Mais, quand le 2 décembre lui eut fait voir les parlementaires pris au piège et mis sous clef aux applaudissements populaires, ce spectacle parut lui ouvrir les yeux et le piquer d'honneur. Il ne songea plus qu'à agir à la Bonaparte, et à mener ces gens-là à la baguette. Rien de plus mal avisé. Bonaparte pouvait commander sans crainte, parce que son nom n'inspirait aucune prévention aux niasses populaires. Ilenri V, au contraire, était accueilli avec toutes les inquiétudes et les susceptibilités que suscite en France toute apparence d'ancien régime. Ce que nous lui demandions était justement le moyen d'acquérir, par un acte éclatant, le genre de force qui lui manquait. (A suivre.) BROGLIE. |