478 REVUE DES DEUX MONDES. même nature qui, dans les conditions où elle la réaliserait, constituerait une faillite partielle ? Nous saurons bientôt, parait-il, quelles sont, sur ce point, les conceptions de M. Caillaux. En attendant, il est facile de discerner les conséquences du retour à l'étalon-or pour la politique extérieure britannique ; il la domine, il l'enferme en d'étroites limites. L'opération n'était possible qu'à la condition d'une entente intime entre l'Angleterre et les États-Unis. Cette entente a été réalisée en janvier, lors du voyage de M. Montagu Norman aux États-Unis. Elle s'étend à tous les domaines ; elle met notamment, quoi qu'en dise M. Baldwin, la politique de l'Angleterre dans une stricte dépendance à l'égard des États-Unis. Depuis qu'à la conférence de Washington l'Angleterre a opté entre son alliance ancienne avec le Japon et l'entente amicale avec les États-Unis, la préoccupation dominante du Gouvernement est de ménager, fût-ce à nos dépens, les sympathies américaines. Plus que jamais la politique des deux grands Empires anglo-saxons est liée ; plus que jamais, cette conjonction a sa réalisation dans le Pacifique, en face du Japon, de la Chine et de la Russie ; plus que jamais, il est certain que, dans ces parages, la'paix du monde est menacée ; plus que jamais enfin, les États-Unis et l'Empire britannique se détachent de la politique européenne ; ils sont si pressés de la liquider qu'ils sont devenus incapables de la voir telle qu'elle est, tant ils voudraient qu'elle fût telle qu'ils la souhaitent. C'est à la lumière de ces constatations qu'il convient de juger le discours qu'a prononcé le 4 mai au banquet des Pilgrims, le nouvel ambassadeur des États-Unis à Londres, M. Houghton. C'est la tradition qu'en souvenir des Pèlerins de la Mayflower soit célébrée chaque année l'amitié anglo-américaine. M. Baldwin n'a pas manqué à cette règle. Quant à M. Houghton, qui passe pour l'interprète de la pensée de M. Calvin Coolidge, il a prononcé, sur un ton d'homélie, un discours qui a le défaut de n'être pas clair et l'inconvénient de paraître encourager l'Allemagne dans la voie dangereuse de la revision des traités. L'ambassadeur des États-Unis à Londres semble vouloir apprendre à vivre à l'Europe continentale ; il nous enseigne que « la bonne foi est le ciment qui maintient l'édifice de la civilisation » ; les Français sont de cet avis. Ils pensent aussi que la première condition d'une coopération entre les États, c'est la solidarité, à l'égard des autres pays, des gouvernements divers que la vie des partis peut amener au pouvoir. Pour avoir manqué aux engagements pris par le Tsar, le gouvernement des Soviets |