476 REVUE DES DEUX MONDES. éclairer la masse des Anglais de bonne foi qui n'ont oublié ni la guerre ni leurs morts. Dans un discours, le 29 avril, M. Luther, après. avoir, la veille, conféré, avec le nouveau président, s'est appliqué à démontrer que si Hindenburg règne, il ne gouverne pas, que rien n'est changé en Allemagne, ni la constitution de Weimar, ni les offres de pacte adressées par M. Stresemannà la France et à l'Angleterre. Le maréchal prêtera serment à la Constitution le 12 mai, en redingote, sans fifres ni tambours, sans appareil militaire. Mais le discours du chancelier fait aussi des concessions à l'opinion natio naliste triomphante ; il sauve l'offre de pacte de sécurité, mais il en fait dépendre l'aboutissement de l'évacuation de Cologne. La presse de tous les partis réclame la publication du rapport de la commis sion d'enquête sur le désarmement : si les griefs étaient sérieux, disent les journaux, on ne tarderait pas tant à les exhiber. Nous pouvons leur répondre qu'ils ne perdront rien pour attendre, ni en précision, ni en vigueur, et que d'ailleurs ils n'attendront plus longtemps. La presse pangermaniste s'indigne des ménagements du chancelier et rejette tout pacte nouveau qui serait un lien t'eplus. Entre M. Stresemannet les, fauteurs de la candidature Hindenburg une sourde lutte est engagée. Pour le moment, les vainqueurs du 26 avril s'acharnent surtout à enlever la dernière forteresse de la social-démocratie, le ministère prussien. M. Braun et M. Severing sont leurs bêtes noires. Si le cabinet de coalition est prochainement mis en minorité, les nationalistes espèrent qu'une dissolution amènera une diète plus imbue du véritable esprit prussien. La Gazette de Francfort (30 avril) ne se satisfait pas des assurances prodiguées par le chancelier ; elle demande, pour atténuer le scandale de l'élection du maréchal, des actes et non des mots, par exemple, quelque démarche attestantle dessein de l'Allemagne d'entrer dans la Société des nations. La Gazette de Francfort se donne un soin superflu : il y a quelque chose de plus singulier, de plus inquiétant que l'élection de Ilindenburg, c'est la légèreté avec laquelle la presse anglaise et américaine, sauf exceptions, en accueille l'annonce. La plupart des journaux anglais affirmaient, avant l'élection, qu'il s'agissait d'une partie décisive, de la République ou de la monarchie, de la paix ou de la guerre ; ils ont à peine pris le temps d'adresser pour la forme quelques remontrances à l'Allemagne militariste, non sans incriminer en même temps M. Poincaré et l'occupation de la Ruhr, puis ils sont revenus avec sérénité à leur campagne en faveur d'un pacte de garantie où entrerait l'Allemagne et dont M. Houghton serait, paraît-il, l'un des |