440 REVUE DES DEUX moNt Es. une barcasse. Malheureusement, le mistral soufflait de plus en plus fort, « comme un enragé » ; il fallut s'abriter dans une petite anse déserte, à l'extrémité de l'île de Scio, pour attendre une embellie. A la douane de Myconos, près de Délos, nouveau retard. Les voyageurs, à peine débarqués, furent mis en quarantaine et obligés de « prendre gîte » pendant une dizaine de jours, entre les murs délabrés d'une chapelle transformée en lazaret. Ils n'avaient d'autre nourriture que quelques morceaux de viande d'agneau, braisés, fumés en plein vent, saupoudrés de cendre, assaisonnés de poussière, en guise de poivre et de gingembre. Soixante-quatre jours s'étaient écoulés depuis leur départ de Constantinople, lorsqu'enfin ils aperçurent, au détour du cap Sunium, les côtes de l'Attique, « pays que tous les savants souhaitent de voir ». Un radieux ciel d'avril brillait sur l'Acropole. Jusqu'au mois de juillet, dans la saison où les Athéniens vont respirer l'air de la mer sur la plage de Phalère ou humer le parfum des fleurs dans les jardins de Képhissia, l'abbé Fourmont refusa de quitter Athènes, continuant sans cesse ses recherches et ses fouilles. II ne voulait point s'en aller avant d'avoir fait le meilleur emploi possible d'une lettre de change de 400 piastres que l'ambassadeur lui avait fait parvenir par un courrier spécial. Ayant consenti à passer dans l'île d'Égi ne, afin d'y goùter quelque fraîcheur sans interrompre son travail, il y attrapa un coup de soleil. La Bibliothèque nationale conserve la lettre où il fit part de cet accident à M. de Boze, l'un des Quarante de l'Académie française, secrétaire perpétuel de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, garde des Médailles et des An tiques du cabinet du Roi : Je suis bien fâché qu'un coup de soleil que j'ai reçu à Égine, en copiant une inscription dans les débris du temple de Jupiter Panhel - lénien, m'ôte aujourd'hui la facilité de tirer de mes papiers une douzaine des plus belles inscriptions que j'ai ramassées dans Athènes et autres endroits de l'Attique, pour vous les envoyer. J'aurais le plaisir de m'acquitter de ma promesse, et l'Académie aurait celui d'avoir la preuve de mestravaux. Mais, puisque je ne puis pas avoir cette consolation, permettez, monsieur, que je vous avertisse au moins où j'en suis... Dès que l'Attique sera finie, j'irai en Morée où j'apprends tous les jours qu'il y a une grande moisson à faire. On a découvert, depuis trois mois, beaucoup d'inscriptions à Argos. M. Auvellier, |