212 REVUE DES DEUX MONDES. l'administration supérieure de l'État, la Justice, l'éducation intellectuelle, technique et religieuse du peuple, les arts, les affaires (banques, commerce, industries locales, etc...) Ces deux villes renferment le dixième environ de la population, et dirigent les destinées du royaume. Le Caire, qui compte actuellement 741 000 habitants, est la capitale politique, le siège du gouvernement royal, du Parlement, des ministères et des administrations publiques, calquées sur le modèle européen. Toute l'aristocratie égyptienne, qu'elle soit d'origine turque ou autochtone, habite le Caire. Elle y occupe de très beaux palais. Il y a quelques années encore, les pachas, et surtout les dames du harem, circulaient dans de magnifiques équipages précédés de sais chamarrés d'or, écartant la foule respectueuse de leurs longs bâtons. Aujourd'hui, les honneurs des saïs ne sont plus réservés qu'aux morts : les coureurs pittoresques, aux jambes musclées, ne galopent plus que devant les chars funèbres. Des limousines des meilleures marques ont remplacé les attelages d'antan. Au lieu des verges blanches des saïs, ce sont des trompes d'automobiles qui font ranger les piétons ; mais on a la consolation d'apercevoir, derrière les glaces des voitures, les visages fardés des belles musulmanes qui ont eu le bon esprit de conserver les hal'cics seyants, abandonnés par leurs soeurs de Constantinople. La présence des grands hôtels de touristes donne à la cité orientale un cachet de cosmopolitisme très curieux. Au Caire, la vie intellectuelle est intense ; les Universités s'y trouvent toutes rassemblées. Là notamment, dans un coin reculé de la vieille ville, se dressent les deux minarets de la mosquée d'El Azhar, où se donne l'enseignement coranique le plus réputé. Sous les arceaux, fleuris d'arabesques, de l'incomparable cour qui date du XVI e siècle, des étudiants provenant des quatre coins du monde islamique, parmi lesquels on rencontre beaucoup de Mogrebhins de nos possessions de l'Afrique du Nord, reçoivent les préceptes de maîtres illustres et se pénètrent de l'unité de doctrine professée à El Azhar. Grâce à cette université, le Caire mérite bien son appellation de métropole de l'Islam, comme Rome celle de la catholicité. Le Caire tire surtout son importance du fait qu'il est le siège de l'artisanat. Dans les souks tortueux de quartiers intacts, plusieurs centaines de mille ouvriers transforment |