1 ? REVUE DES DEUX MONDES. en claquant des éclairs sonores. Masse énorme, emportée d'un tel élan, qu'elle allait, en écrasant tout, traverser Montalbe comme un bolide... - Ce n'est pas une berline, ni un briska, dit la vieille dame... Sans doute, une chaise de poste, mais il y a au moins quatre chevaux... - Té 1 c'est le Roi qui voyage, dit la Mion, ou bien monseigneur le Duc d'Angoulême... - Il n'y a plus de Duc d'Angoulême, sotte bête !... Il y a le Duc d'Orléans... Je te l'ai dit cent fois. r%lais la Mion, plus bas et d'un ton craintif : - Seigneur Jésus, c'est la « galérienne » Au tournant de la route, l'ouragan de bruit crevait. Parurent d'abord deux gendarmes à cheval, puis cinq chevaux attelés en flèche, bêtes puissantes excitées par le froid et par le fouet des postillons ; et enfin, la voiture infâme, peinte en jaune, divisée dans sa hauteur et dans sa largeur par une grille de fer treillissé. Sur le devant, un huissier et un gendarme étaient assis. A travers le grillage, se montraient vaguement, des faces blêmes... Les fenêtres s'ouvrirent. Des gens accoururent. Parmi les quolibets et les imprécations, un cri se répercutait : « La galérienne I... La galérienne 1... » Elle passait une fois par an, conduisant des condamnés à la maison centrale de Limoges, et elle laissait derrière elle, dans les petites villes et les villaps, un remous d'horreur superstitieuse. Les mères la montraient aux enfants, et des gens paisibles, palpitant à l'idée du vol et du meurtre, se précipitaient dehors pour entrevoir les prisonniers. Souvent, des garnements jetaient des pierres qui rebondissaient sur la caisse doublée de tôle. - Hou I quelles figures I... Des rats dans la ratièrel... Madame les a bien vus, les bandits ? La « galérienne » descendait la route vers le pont de la Dronne. Les fenêtres se refermaient. Les passants s'éloignaient... Les chiens aboyaient encore.. Mme Lapeyrade s'en alla fouiller sous son traversin., - Bah 1 dit-elle en cherchant le trousseau de clefs qu'elle trouva et mit dans sa poche, ne voilà-t-il pas de quoi s'ébahir ?le vis mieux que cela en 1805, lorsque je fis le voyage de Itochefort avec mon pauvre mari. Mon cousin de Chantoux |