934 REVUE DES DEUX MONDES. choisis hors de l'enceinte des villes indigènes, et à quelque distance. » Telles furent, si j'ose les résumer en ces quelques lignes, les directives du maréchal Lyautey. Et c'est ainsi que partout au Maghreb, à côté de la cité indigène merveilleusement intacte dans sa ceinture crénelée, vous trouvez la ville française, où d'ailleurs, obligatoirement, l'architecture des maisons et des bâtiments publics est soumise à des « canons » harmonisés d'une manière heureuse, aux grandes lignes de l'architecture arabe. Et cette ville française, nous le verrons, jouit de tous les progrès de la technique moderne. C'est ainsi que partout au Maroc, à côté de la beauté qui est restée inviolée, à côté du passé dont l'étrange attrait a été respecté, l'utilité a trouvé néanmoins le plus libre essor, Que l'utile puisse se développer sans nuire au beau ; que « le moderne » n'écrase et ne détruise pas l'oeuvre des ancêtres, c'est une chose bien rare dans le monde. C'est une chose qu'on voit au Maroc et sans doute nulle part ailleurs. Rivé, que je suis, à la galère des choses de la science et de la technique, je ne me pardonnerais pas de m'abandonner ici à l'intense impression de poésie, à la magie orientale qui vous enveloppe et ne vous laisse plus, dès qu'on a touché à la terre maghrébine. C'est donc des applications de la science au Maroc, — et combien elles sont d'ailleurs intéressantes 1 — que j'entretiendrai aujourd'hui mes lecteurs. Mais comme il n'est point de tableaux, — fût-ce un graphique d'ingénieur, qui ne comporte un cadre, je voudrais en quelques mots préciser d'où provient, selon moi, la séduction particulière du Maroc, je voudrais rechercher pourquoi on y goûte mieux. qu'en tout autre pays le charme singulier et prenant de l'Orient. Parmi les raisons qui me paraissent ici opérantes, on verra qu'il en est qui relèvent précisément de l'art de l'ingénieur. « Ne m'envoyez surtout pas de coucher de soleil », me disait un homme d'esprit, lors d'un lointain voyage d'où devaient être rapportés quelques impressions nécessairement, — on n'échappe pas à son destin, scientifiques. La justesse de cette recommandation, la quasiimpossibilité qui se dresse devant le technicien, lorsqu'il prétend aborder la description littéraire des phénomènes. les antinomies que, cela implique, tout cela nous apparaît au premier mot tombé de la plume. Comment pouvons-nous en effet parler du charme de l'Orient à propos du Maroc ? L'Orient, scientifiquement parlant, c'est, ce ne peuh |