850 REVUE DES DEUX MONDES. organe de cassation, et d'un Tribunal des conflits chargé de dépar tager la compétence de ces nouvelles juridictions d'avec les juridictions devenues désormais d'ordre exclusivement judiciaire. La deuxième difficulté est beaucoup plus complexe : à côté des tribunaux proprement dits, de ceux que l'on pourrait comparer à nos tribunaux civils français de droit commun et qui sont désignés sous le nom de tribunaux Nizamieh, existent les cadis et les tribunaux du Cherieh (tribunaux religieux musulmans), puis les tribunaux religieux épiscopaux et patriarcaux (ter et 2 degrés de juridiction) de certaines communautés chrétiennes qui, à des époques différentes et dans certaines régions des territoires actuellement confiés au mandat français, ont obtenu du Gouvernement de la Sublime Porte des iradés ou des firmans leur accordant certains privilèges de juridiction. Sans songer à donner des indications complètes sur ces partages de compétence, on peut signaler, en règle générale, que le cadi connaît de toutes les questions de statut personnel (mariage, divorce, pension alimentaire, tutelle, succession) pour les musulmans et même pour les non mulsulmans ; la compétence des juridictions chrétiennes ne constitue que des dérogations limitées aux communautés, aux matières et aux circonscriptions prévues par les décisions, souvent incertaines ou imprécises, qui en ont autorisé l'exercice (1). Que l'on imagine un mariage entre deux conjoints de rites différents, célébré à l'étranger par une autorité civile, suivi d'une ou deux conversions plus ou moins désintéressées et sincères, rompu par un divorce à une date où les époux habitaient un pays qui en admet l'institution, accompagné d'une naturalisation étrangère ou de la naissance d'un enfant acquérant une nationalité étrangère ; que les réclamations des consuls de différentes Puissances ajoutent les complications diplomatiques aux controverses religieuses ; et tout le droit canon joint au droit international privé sera impuissant à résoudre des conflits dont le seul exposé est impressionnant. Dans le seul État du Grand Liban, tel qu'il est actuellement constitué par la jonction de l'ancienne province autonome du Mont Liban et de parties des vilayets de Beyrouth et de Damas, l'archevêque maronite de Beyrouth, dont le diocèse empiète sur (1) Il faut mentionner aussi les juridictions consulaires, compétentes, en vertu des capitulations, pour tout procès intéressant un étranger. |