570 REVUE DES DEUX MONDES. qui ne sont pas formés au point de vue militaire, doit tout assurer lui-même ; il ne peut se reposer du soin d'aucun détail sur son cadre de sous-officiers. On comprend que, dans ces conditions, il soit obligé de négliger l'instruction des anciens soldats pour s'occuper presque exclusivement de celle des recrues. La situation serait toute différente, s'il pouvait disposer en permanence de deux sous-officiers rengagés. Cessant d'être un exécutant, il pourrait reprendre son rôle de surveillant et de directeur, et poursuivre, en même temps, le perfectionnement de l'instruction des demi-contingents les plus anciens et le dressage des recrues. S'agit-il maintenant de la préparation et de l'entraînement des spécialités, la manière de procéder à laquelle nous sommes actuelle ment contraints entraîne des conséquences déplorables. On sait l'importance que prend dans la bataille le rôle du fusilier mitrailleur. Son matériel est assez léger pour que, dans la progression, il puisse tirer en marchant et obliger l'ennemi, sous cette grêle de balles, à rester terré derrière son couvert ou dans sa tranchée, sans oser riposter. Pour tirer parti de son arme, pour favoriser la marche de ses camarades, le fusilier mitrailleur doit s'avancer hardiment debout, cible offerte aux coups de l'ennemi ; cela demande de sa part confiance en luimême et en son arme, autant que courage et abnégation. En cas d'arrêt, il lui faut se glisser tout à fait en première ligne, à côté des patrouilleurs de pointe, pour prendre à partie l'Îlot de défenseurs qui résiste. Pour remplir les missions qui lui sont assignées, il faut qu'il ait une très grande habitude de son arme, habitude qui ne se conserve que par un maniement journalier. Or, actuellement, il n'est pas possible de poursuivre chaque jour l'instruction de nos fusiliers mitrailleurs. On a essayé d'obvier à cet inconvénient, en créant des centres d'instruction régionaux pour les officiers et les sous-officiers. La formation de ces derniers est peu productive pour l'ensemble ; très souvent, leur stage se termine en même temps que leur temps de service. Et ne cessons de répéter que l'instruction dans les écoles ne peut jamais remplacer celle qui est donnée dans l'unité. Quelques données numériques feront mieux comprendre encore la gravité d'un tel état de choses. N'a-t-on pas calculé que le jeune soldat, pendant toute la durée de son service, ne |