REVUE DES.D.EUX MONDES., ortè cahi talisee. Chez ces, viçillë.:gens,.fâçonneb pai : dqs siècles de. christianisme, on avait le respect et le souci du prochain On lui cédait sa place, on devait s'effacer devant lui, s'évertuer à lui plaire comme à le servir. On était à cent lieues de la goujaterie contemporaine qui marche férocement sur tous Ies pieds, qui écrase, à toute vitesse, les gens et les bêtes. En ce temps-là, comme au XVIIIe siècle, la grande préoccupation était d'être aimable. Les portraits des ancêtres en perruques poudrées et aux lèvres fleuries d'un perpétuel sourire, ne prêchaient point autre chose... Quel contraste avec leurs descendants ! Je me rappelle que, dans l'humble salon derna grand mère, deux portraits se faisaient vis-à-vis, celui d'un aïeul, capitaine de dragons sous Louis XVI, et celui d'un cousin, capitaine de cuirassiers sous la Troisième République. Le cuirassier, derrière ses grosses moustaches, avait l'air d'un dogue qui défend un os à moelle ; le contemporain de Marie-Antoinette, avec ses yeux spirituels et sa bouche en coeur, semblait décocher un madrigal à toutes les visiteuses qui entraient. On voulait plaire, on se faisait une joie de recevoir. Représenter, recevoir et être reçu paraissait être le but unique de la vie. Ma grand mère elle-même et mes tantes, toutes petites rentières, plutôt pauvres, ne vivaient, en somme, que pour cela. Tout tendait à cela. La considération des visites à recevoir gouvernait l'emploi de la journée. On se levait de bonne heure, dès six heures et demie ou sept heures, même en hiver, par les grands froids, alors qu'il ne faisait pas encore jour. On se hâtait d'expédier, pendant la matinée, toutes les besognes ménagères, afin d'avoir, comme on disait, « son après-midi devant soi ». Aidées d'une seule femme de ménage, la mère Liffoisse, qui était une chronique vivante, mes tantes vaquaient, pour ainsi dire, à tous les travaux du logis. Et, tout en époussetant les chaises du salon, ou en râclant les carottes du pot-aufeu, elles écoutaient la mère Liffoisse conter les nouvelles. Quand celle-ci disait : « Tout Briey en parle ! » mes tantes palpitaient de curiosité et, quelquefois, d'émotion. Pour moi, qui prêtais l'oreille à ces ragots, je me sentais plein d'admiration pour cette mère Liffoisse, qui connaissait son Tout-Briey sur le bout du doigt... « Pensez ! Tout Briey en parle !... Tout Briey l'a su ! » Je comprenais que l'affaire était grave, qu'il y avait de la catastrophe dans l'air, du moment que « tout Briey » était |