720 REVUE DES DEUX MONDES. où « la religion n'était pas le christianisme des banquiers mais celui des catacombes ». Une telle injure, absurde et odieuse, provoqua un de ces tumultes suivi de pugilat qui sont maintenant la pratique courante de la Chambre. Comme le marquis de la Ferronnays, au nom des catholiques insultés, réclamait énergiquement une rétractation, c'est lui que le Président de la Chambre frappa de la censure avec exclusion temporaire. Une telle rigueur, contraire au règlement, — M. Marin l'a montré, — à l'égard d'un député qui n'est jamais ni violent ni discourtois et qui jouit de l'estime générale, nous édifie sur la façon dont M. Painlevé comprend l'impartialité présidentielle. M. Herriot voit dans la déclaration un défi « à la société moderne et à la République ; » s'il en est convaincu, une conclusion s'impose à lui, celle-là même qui s'est imposée à tous les gouvernements jusqu'à 1905 : la nécessité d'une ambassade de France auprès du Saint-Siège et d'une nonciature à Paris. Lorsqu'un gouvernement, quel qu'il soit, croit avoir à se plaindre de l'attitude envers lui d'une partie ou de l'ensemble du clergé, surtout dans un pays oit le clergé n'est lié par aucun traité avec l'Jtat,il est indispensable qu'il dispose d'un canal régulier, officiel, pour faire entendre au chef de la catholicité l'écho de ses doléances ; et réciproquement le Pape doit avoir un moyen normal et permanent de communication avec les gouvernements. Faute de cette représentation diplomatique, le moindre incident peut dégénérer en un conflit aigu et sans issue. Ceux qui, en France, ne veulent ni ambassade ni nonciature sont, des deux côtés, les ennemis de la paix religieuse. Dans les moments critiques de notre histoire, la paix des consciences comme celle de l'État a été assurée par l'entente directe du gouvernement français et du Saint-Siège. S'il avait fallu attendre l'adhésion unanime de tous les évêques, naturellement engagés plus à fond dans la lutte quotidienne, Ilenri IV serait resté protestant et le concordat n'aurait jamais été signé. M. Herriot, qui se dit gallican, se fait une idée tout it fait inexacte de l'histoire de l'Église de France. Ori veut espérer que le Sénat, à la suite de la majorité de sa commission des finances, y réfléchira pour lui. La nécessité bienfaisante de relations diploma'tiques régulières avec le Saint-Siège n'a jamais été plus clairement démontrée que par la manifestation qui vient, pendant quelques jours, d'occuper l'opinion publique et le Parlement. Le Directeur-Gérant : RENÉ Douane. RENÉ PINON. |