REVUE DES DEUX MONDES. Mais ce que nul ne vous saurait apprendre, si vous ne les entendez point, c'est la grâce, le charme, la finesse, l'esprit et le sentiment de ces chansons exquises, l'agrément, la beauté enfin que leur donnent la mélodie et l'harmonie ensemble, le parfait accord des instruments et des voix. Le dernier surtout de ces petits poèmes : « Lidia, spina del mio core », est une merveille de tendresse et de mélancolie. Un siècle et demi après, le Pergolèse du « 7're giorni son che Nina », n'écrira rien de plus touchant. Et maintenant, comme dit Molière, « ramenez-moi chez nous ». Chez nous Français, qui nous connaissons mal, qui ne savons pas assez quels nous sommes et surtout quels nous avons été. Est-il beaucoup d'entre nous à qui soient familiers nos grands violonistes du XVIII° siècle, leurs oeuvres ou seulement leurs noms : un Jean Fery Rebel, un Aubert, un l'Abbé, un Mondonville, un Leclair même, le plus grand de tous : 'Et je ne cite ici que ceux dont nous avons l'autre soir entendu quelques fragments. Virtuoses, mais compositeurs aussi, créateurs autant qu'interprètes, ils excellaient deux fois dans leur art, et souvent dans les formes ou les genres divers de leur art : musique de chambre ou de concert, opéras, divertissements, ballets. Avec cette variété quelle abondance ! Aujourd'hui, si l'un de nos musiciens vient à composer une sonate, je dis une, ce n'est pas une petite affaire. Avant, après, il n'est question que de la sonate du « maître » tel ou tel. La veine de nos aïeux était moins avare. Exemples, inscrits au programme : de Jean Fery Rebel, prélude de la quatrième sonate du second livre. Et pour la gravité, l'ampleur et la noblesse, le dit prélude est digne de Haendel. Plus loin : gavotte de la sonate n°5 du cinquième livre, d'Aubert.. De Leclair, de Guille.nain, de Mondonville, voici trois « chasses », pièces descriptives et cynégétiques. Dans la dernière surtout le violon, un seul violon, sonne des fanfares admirables d'éclat et de puissance. Rien * de plus charmant que certain petit morceau de l'Abbé, pour violon solo toujours, et qui s'intitule : « Air gay », extrait des « Jolis airs ». Voilà, n'est-ce pas, des noms que la musique aujourd'hui ne porte plus guère, et pour cause. Enfin un concert de cette qualité, et de cette nouveauté, nous offre une heureuse occasion de recommander à tous nos lecteurs, à ceux qui savent comme à ceux qui désirent apprendre, un ouvrage très considérable dont la publication, en trois gros volumes, vient à peine de s'achever. « L'Écolef,.anfaise de violon, de Lulli à Viotti » par M. Lionel |