596 REVUE DES DEUX MONDES. sio, les Quartillosa, les Macaria, avaient jadis été enfantés à la vie spirituelle : ils étaient, eux aussi, des artisans, des travailleurs des champs, comme ces B3rbèresl à qui s'adressait l'apostolat des Pères Blancs. Il semblait qu'au delà des siècles, une lignée chrétienne se renouât. Et, (l'autre part, le premier concile d'Afrique, en « louant et encourageant » la société des Pères Blancs, dont les membres, en six ans, s'étaient élevés à une centaine, érigeait la province d'Afrique en terre de croisade. « La Providence, précisait Lavigerie dans une lettre aux Pères Blancs, voulait que cette conquête, la dernière des rois très chrétiens, fût aussi la dernière croisade, celle qui doit se consommer par les armes vraiment apostoliques, la charité et le martyre. Elle voulait que des apôtres nouveaux partissent de ces rivages où est mort le plus saint de nos rois (1). » Il est d'usage qu'à la fin d'un concile provincial, des acclamations liturgiques, s'élevant jusqu'aux voûtes du sanctuaire, traduisent en mots ailés les voeux des âmes. Après que le concile eut souhaité « de longues années à l'archevêque Lavigerie, restaurateur des conciles d'Afrique, et l'achèvement de toutes les oeuvres si courageusement entreprises par sa charité pour l'extension de la religion chrétienne », d'autres acclamations retentirent, où l'archevêque avait su résumer toute l'histoire d'hier et de demain. Le célébrant proclamait : « A l'Église d'Afrique, ressuscitée d'entre les morts, alleluia 1 alleluia I » Et la foule répondait : « Puisse-t-elle, après sa résurrection, ne jamais plus mourir ! » Le célébrant alors reprenait : « A l'armée française qui, par sa valeur invincible, a conquis et conserve au règne de la croix et à la civilisation chrétienne ces régions infidèles 1 » A quoi le peuple chrétien répliquait, empruntant les paroles bibliques : « Qu'ils avancent sur leurs chars et sur leurs chevaux, et nous, nous invoquerons pour eux le Dieu des armées ! » Mais d'autres avaient besoin d'invocations ; la liturgie continuait : « Aux missionnaires qui, par la grâce de Dieu, veulent porter la lumière de l'Évangile aux peuples de l'Afrique, assis dans les ténèbres et à l'ombre de la mort. » « Qu'ils sont beaux, s'écriait alors le choeur, les pieds de ceux qui annoncent la paix, qui annoncent le bonheur Que le Seigneur dilate leurs tentes ! » (t) Lavigerie, CEuvres choisies, I, p.26$. |