516 REVUE DES DEUX MONDES. LA LIMITE AU-DESSOUS DE LAQUELLE ON NE PEUT DESCENDRE Si l'Allemagne s'était acquittée de toutes les obligations militaires stipulées dans le traité de Versailles, peut-être pourrions-nous aujourd'hui envisager la diminution de nos effectifs et, par suite, celle de l'étendue des charges imposées à la nation. En 1920, on pouvait croire au désarmement de l'Allemagne ; aujourd'hui, une telle illusion n'est plus permise. L'obligation s'impose à nouveau pour nous de nous armer, et même d'envisager, dès maintenant, la nécessité de reconstituer sur nos frontières des zones défensives. Le service de dix-huit mois nous a donné l'armée minima : nous avons atteint la limite au-dessous de laquelle nous ne pouvons descendre sans compromettre l'avenir. Les partisans à tout prix de la réduction de la durée du service militaire, pour justifier leur thèse, s'appuient, dans leurs discours, tantôt sur les avantages que confère au Reich la constitution de son armée suivant une formule nouvelle, tantôt sur notre supériorité en matériel de guerre. Que valent ces arguments ? L'armée allemande, à l'heure actuelle, n'est pas autre chose qu'une formidable armée de métier, de 200 000 hommes, toujours prête à entrer sur l'heure en campagne, doublée d'une deuxième armée de cadres, de 100 000 officiers et sous-officiers dont le rôle est complexe. Elle doit, cette deuxième armée, pouvoir absorber les jeunes classes dont l'instruction a été commencée dans les stages volontaires de deux à trois mois, qu'elles effectuent dans les unités de la Reichswehr ; en quelques semaines, elle achèvera de les dresser, pour les rendre aptes à appuyer l'effort de l'armée de métier. Sur ce point, conception française et conception allemande sont très voisines, si ce n'est identiques. Le Conseil supérieur de la guerre en France était entré dans cette voie, en 1921 et en 1922, en acceptant la réduction du service militaire à dix-huit mois, contre la garantie qui lui avait été donnée d'assurer à l'armée 100 000 soldats de métier. Si nous en avions augmenté le nombre, le Conseil supérieur eût sans doute consenti à une nouvelle réduction du service militaire. Qu'on veuille bien réfléchir toutefois que la solution adoptée par l'Allemagne est très coûteuse. Elle dépasse nos moyens à nous qui ne pouvons même pas obtenir les quelques dizaines de mil- |