POÉSIES VISIONS D'EXTRÊME-ORIENT LE FAKIR Sous le banyan ciré, dans un air immobile, Il est là, son long corps desséché jusqu'aux os, Et rien ne vient troubler l'immuable repos, Où, roi du Temps, l'esprit commande à la chair vile. Ni l'averse, ni le soleil, tombant à flots, Ne lui feront ouvrir ses paupières hostiles. Méprisant tout, la terre et les foules serviles, Il reste dans son rêve obstinément enclos. Mais quand, sous l'arbre saint passant d'un pas rapide, Je l'ai frôlé, soudain le squelette rigide A brusquement rouvert les yeux sur l'inconnu. Nul muscle n'a bougé, mais ce regard de haine Jusqu'au bout de mes jours suivra ma course humaine, Çe regard du fakir sec, immobile et nu. NAGINAH MASJID Le triple turban blanc des coupoles neigeuses Par-dessus le toit plat s'arrondit doucement, Dans un coin écarté du royal monument, Plein de silence, loin des foules tapageuses. Sur les murs incrustés d'or et de diamant, Les entrelacs, gravés par une main pieuse, Font un large dessin de forme harmonieuse, Ajoutant le mystère à l'éblouissement. Budh Gaya, 19i0. |