390 REVUE DES DEUX MONDES. nistrer leur unité, d'en tenir à jour les nombreux registres et répertoires. Eux qui devraient être des hommes d'action, ils sont invités à devenir des fonctionnaires presque uniquement préoccupés de leurs archives, perdant le contact avec la troupe, ne vivant plus de sa vie. La dernière guerre a prouvé que ce sont les chefs de bataillon qui mènent la bataille. Seuls, ils peuvent, à peu près, commander à la vue les troupes placées sous leurs ordres, tout en disposant d'éléments de feu suffisants pour préparer et appuyer la marche de leurs unités en premièreligne. Si la guerre éclate à nouveau demain, c'est eux qui auront encore à supporter toutes les responsabilités de la bataille, à moins qu'avec le progrès des armes automatiques et leur diffusion, la conduite de la lutte ne leur échappe et ne passe entre les mains de leurs commandants de compagnie. Que fait-on pour préparer chefs de bataillons et commandants de compagnies à leur rôle futur ? Jusqu'ici, la principale force de notre armée résidait dans la camaraderie qui existait, dans toutes ses unités, entre officiers, gradés et soldats, chacune d'elles constituant réellement une famille où tous se connaissaient. Il est à craindre qu'il n'en soit plus ainsi demain, si on maintient telle quelle l'organisation de notre armée. 11 ne faut pas que les membres d'une même famille perdent l'habitude de se réunir, de causer ensemble ; il ne faut pas qu'ils se perdent de vue, que chacun d'eux se laisse emporter par un courant particulier ; sans quoi la cohésion de notre armée ne serait plus qu'un vain mot. LENTEURS ET INÉGALITÉS DE L'AVANCEMENT La question de l'avancement dans l'armée est extrêmement complexe. Il se ralentit chaque jour. Les postes élevés sont occupés, pour de longues années encore, par des généraux jeunes. La plupart resteront en fonctions jusqu'à leur limite d'âge. Il en est de même pour notre cadre d'officiers supérieurs. Dans ces conditions, les éléments jeunes n'ont aucune perspective d'avenir. Ils sont condamnés, à moins de circonstances exceptionnelles, à prendre leur retraite en qualité de commandants. Certains officiers sortis de Saint-Cyr, en 1903, dans l'infanterie coloniale, ayant fait toute la guerre sur le front fran- |