888 REVUE DES DEUX MONDES. agricole. En 1906, elle fut nommée officier d'Académie pour la création entièrement à ses frais de l'école franco-arabe de Courdane. On lui doit d'ailleurs quatre écoles que les enfants indigènes fréquentaient avec assiduité. La dernière en date fut l'ouvroir-école d'Aïn-Mahdi où les fillettes apprenaient à la fois le tissage des tapis indigènes, dont la vente augmente le bienêtre de la famille, et quelques éléments d'instruction. C'est une des premières écoles qui aient fonctionné en Algérie pour l'instruction des filles ; l'autorité de Mme Tedjani contribua beaucoup à vaincre la répugnance qu'avaient les parents à faire instruire les petites indigènes. En 1911, le général Bailloud qui commandait le 19e corps d'armée à Alger vint visiter Courdane. Sid-el-Bachir avait été récemment nommé chevalier de la Légion d'honneur. Le général s'étonna que la même distinction ne fùt pas accordée à la Française dont il jugeait sur place l'oeuvre civilisatrice et qui, pendant quarante ans, dans un milieu déprimant, en lutte avec l'isolement et des difficultés de toute sorte, avait su garder sa personnalité, sa marque de Française et en faire bénéficier une importante confrérie musulmane dont elle avait fini, bien que restant chrétienne, par devenir le vrai chef. Si l'on trouvait digne du ruban rouge Sid-el-Bachir, qu'on peut traiter sans injustice de prince fainéant de la confrérie, — ne méritait-elle pas semblable récompense, la conseillère de deux cheik mal préparés à leur rôle qui auraient pu, excédés par les suspicions dont ils étaient l'objet, devenir les ennemis d'une autorité dont ils s'étaient faits au contraire les auxiliaires dévoués et souvent précieux ? Le général Bailloud promit de s'employer pour faire obtenir la Légion d'honneur à Mme Tedjani. Mais si une proposition fut faite, elle dort oubliée dans quelque carton et Mme Tedjani attendit en vain... ** Le 9 juin 1911, Sid-el-Bachir mourut d'une congestion cérébrale, après avoir eu trois attaques d'apoplexie. La première le paralysa et Mme Aurélie l'installa chez elle à Courdane pour essayer, avec son habituel dévouement, de lui rendre l'usage de ses membres à l'aide d'un appareil électrique qu'elle fit venir d'Alger. |