L'Eau Magazine n°22 nov 13 à mai 2014
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Politique de l’eau Gestion de l’eau en France  : pour répondre à des procès injustes et inutiles Par Jean Launay, député du Lot, président du Comité National de l’Eau (CNE) et Michel Rocard, ancien Premier ministre. 20 La démocratie de l’eau est vivante en France. Elle repose depuis longtemps sur une logique de concertation, celle-là même que nous envions parfois aux pays nordiques dans bien d’autres domaines, adaptée aux territoires de l’eau par-delà les frontières administratives. L’eau, essentielle à la vie, doit rassembler au lieu de diviser. Il appartient au politique d’instaurer la confiance et d’améliorer ce qui peut l’être, et non d’instiller de la défiance entre les acteurs de la communauté de l’eau. Or, la quasi-concordance de la sortie du rapport de Michel Lesage sur l’évaluation de la politique de l’eau et celle du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires sur la fiscalité affectée ne relève pas du simple hasard. C’est, au contraire, le signe d’une préparation des esprits, progressive et souterraine, à un bouleversement, plus qu’à une réforme de fond, du système actuel de gestion de l’eau en France. Or, ce système a fait ses preuves, il est reconnu comme précurseur par l’Union européenne, et il constitue une expression originale de démocratie adaptée à son sujet. L’eau concerne tous les Français, lesquels estiment qu’ils ont droit à une eau de qualité et à un prix raisonnable. Ceci est légitime  : notre pays, par ses caractéristiques géographiques, dispose de ressources confortables et régulières. Il s’agit donc là d’un bien commun, et il est normal d’éclairer les Français sur les termes du débat. Il faut donc rappeler quelques réalités concernant l’eau et sa gestion, réalités intangibles  : Première réalité L’eau est liquide. Elle est insaisissable et file entre les doigts. De sorte qu’il n’y en a pas assez quand et où il en faudrait davantage, et qu’il en arrive encore quand et où il y en a déjà trop. Il faut donc maîtriser autant que possible cette eau indocile, ce qui est difficile, tant les moyens humains restent dérisoires face à la force de la nature. C’est donc un effort long, obstiné, et toujours recommencé auquel nous sommes soumis. Deuxième réalité L’homme est oublieux. La crise passée, on oublie facilement les désastres, crues, sécheresses, inondations et pénuries, c’est pourquoi il faut inscrire la gestion de l’eau dans le temps long, et prévoir les nécessaires travaux à une échelle pluriannuelle et détachée du temps électoral et du temps budgétaire. Troisième réalité La quantité et la qualité des eaux sont interdépendantes tout au long d’un bassin versant. Il s’agit d’un même écosystème  : une pollution en amont altère à l’évidence la qualité de l’eau en aval et perturbe l’écosystème au long du fleuve. Il s’agit là d’une réalité physique qui modèle les comportements humains  : il existe une solidarité de fait dans un même bassin versant et elle n’est pas seulement théorique. C’est pourquoi le modèle français de l’eau est fondé sur les agences de bassin, dont les décisions sont prises en pleine transparence et concertation ; dont le fonctionnement s’inscrit dans une échelle pluriannuelle ; et dont le L’eau magazine novembre 2013 N°22
système de prélèvement s’efforce de traduire la solidarité des différents consommateurs. Le modèle français de l’eau est en place depuis 1964. Il est antérieur à la décentralisation, qu’il anticipe en quelque sorte. Il est fondé sur la gestion par bassin versant que la directive-cadre européenne sur l’eau préconise aujourd’hui et que les Nations unies donnent en exemple comme cadre pertinent pour toutes les politiques de l’eau dans le monde. Cela tient pour l’essentiel à ce que cette loi a eu l’immense avantage d’introduire, ce qui fut une première mondiale, le principe pollueur-payeur dans le droit public. Ce principe fut constitutionnellement validé en France par l’incorporation de la Charte de l’environnement dans le préambule de la Constitution lors d’une réunion du Parlement en congrès à Versailles le 28 février 2005. Quelques années plus tard, l’OCDE en fit la recommandation générale à tous ses États membres. Il est enfin un modèle assez exemplaire de la concertation que le Premier ministre souhaite devenir la méthode privilégiée de gestion des affaires publiques. En effet, la gouvernance des comités de bassin, des commissions territoriales, des commissions locales de l’eau, repose sur l’écoute et l’implication de tous les acteurs (institutionnels, usagers, socio-professionnels). Le Comité national de l’eau lui-même est le lieu de synthèse de toutes ces instances. Notons au passage que depuis un an (un temps peut-être trop court), Michel Lesage y a systématiquement été associé. Curieuse attitude, donc, que celle qui consiste à jeter le bébé avec l’eau du bain et à faire à notre modèle ce procès inutile. Certains constats peuvent être partagés. Même avec un modèle éprouvé, il y a toujours des marges d’amélioration et c’est la mission d’évaluation de la politique de l’eau en cours, qui dira la balance coût/bénéfice d’un système de gestion connu et stabilisé. Mais certaines critiques trahissent soit une méconnaissance du dispositif, soit une réflexion trop hâtive. Première critique Le dispositif actuel ne permettrait pas à l’État d’exercer sa nécessaire tutelle, expression de la solidarité entre tous les citoyens. Ceci est largement inexact. Dans le système actuel, l’État a déjà toute sa place. Les Agences de l’eau sont des établissements publics de l’État ; l’État désigne présidents des conseils d’administration et directeurs généraux des Agences ; l’État désigne un commissaire du gouvernement pour chaque réunion et il est en outre représenté à chaque réunion par l’ensemble des directeurs régionaux des services déconcentrés de l’État concernés. C’est pourquoi l’État doit cesser de se méfier de lui-même, d’autant que la tutelle organise un pré-conseil d’administration avant chaque conseil d’administration, qui réunit la Direction de l’eau et de la biodiversité, la Direction du budget et le contrôle financier pour des réunions qui permettent de débattre, de régler, voire d’arbitrer le plus en amont les positions de Politique de l’eau L’eau magazine novembre 2013 N°22 21 J.L. Aubert_AELB Le système actuel de gestion de l’eau en France est considéré comme précurseur par l’Union européenne.



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